CONNAISSANCE DU CINEMA - 2  (1)

AUTRES AUTEURS - GENRES

Bernardo Bertolucci

 Jacques Becker

 Robert Bresson

 Luc Besson

 Leos Carax

 René Clément

 Henri Georges Clouzot

Julien Duvivier Jacques Feyder Georges Franju

 Stephen Frears

Terry Gilliam  Werner Herzog

Abbas Kiarostami 

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Claude Lelouch  

Philippe Lioret 

Ernst Lubitsch

Joseph L. Mankiewicz

 Monty Python   

 Max Ophuls

Maurice Pialat

 Jean Paul Rappeneau

Eric Rohmer

Claude Sautet

Ridley Scott

Volker Schlöndorff

Martin Scorcese  

 Bertrand Tavernier

 Un auteur, un film ! - Robert Hamer  : Noblesse oblige - Albert Lewin : "Pandora" - Charles Laugton : "La nuit du chasseur"

Percy Adlon : "Bagdad café" - Jacques Feyder : "La Kermesse héroïque" - Ishii Katsuhito : "The taste of tea"

Percy Adlon

Fils d'un chanteur d'opéra et d'une membre de la famille des hôteliers Adlon de Berlin, Percy Adlon commence une carrière au théâtre puis devient animateur de radio, spécialisé dans les sujets littéraires. Dans les années 1970, il se tourne vers la télévision et réalise des documentaires. Son premier long métrage, Céleste, sort en 1981.

                                         

Bagdad Café

Synopsis

Jasmine Münchgstettner, une touriste allemande, de la ville de Rosenheim (à 50km au sud-est de Munich), quitte son mari et échoue en plein désert avec, par erreur, pour tout bagage, la valise de son mari contenant la garde-robe très bavaroise de celui-ci et un jeu de magie. Elle atterrit au Bagdad Café, un motel poussiéreux, situé loin de Las Vegas au bord de la célèbre Route 66. Le Bagdad Café est géré par Brenda, une femme épuisée et excédée, qui élève ses enfants, dont un, musicien, est fan de Bach, une ado fantasque et un petit-fils, sans pouvoir compter sur son fainéant de mari qui l'a quittée. Le café est le refuge de gentils marginaux : un serveur amérindien lymphatique, Rudy Cox, un ancien peintre décorateur d'Hollywood, une tatoueuse misanthrope ainsi qu'Éric, un campeur lanceur de boomerang.

Jasmine bouleverse la vie de cette petite communauté et ramène la clientèle de routiers qui désertaient ce trou sinistre, grâce à un grand coup de ménage tout germanique et à ses talents de prestidigitatrice. Chacun, y compris Jasmine, voit sa vie transformée, notamment Brenda, qui trouve une amie et sourit à nouveau. Une idylle se noue entre Jasmine et le peintre, qui fait d'elle des portraits de plus en plus dénudés. Mais Jasmine, dont le visa a expiré et qui n'a pas de permis de travail, doit bientôt repartir en Allemagne, au grand désespoir de tous. Après quelques mois, elle téléphone (d’où le titre de la chanson générique du film, Calling you) et elle revient. Brenda et elles s'étreignent, la vie reprend et le Bagdad Café est plus florissant et animé que jamais sous l'œil éberlué du mari de Brenda. Dans la dernière scène du film, le vieux peintre propose à Jasmine de l'épouser, pour régler définitivement son problème de permis de séjour, elle répond seulement : « Il faut que j’en parle à Brenda. »

 

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Bernardo Bertolucci

Bernardo Bertolucci  est un scénariste et réalisateur italien, né le 16 mars 1941 à Casarola et mort le 26 novembre 2018 à Rome.

Les 4 films cultes

Bernardo Bertolucci est le fils aîné du poète Attilio Bertolucci et le frère de Giuseppe Bertolucci. Il commence à écrire dès l'âge de 15 ans et est récompensé pour son travail peu de temps après. Il reçoit notamment le Premio Viareggio. Il se rend ensuite à Rome pour ses études et devient l'assistant de Pier Paolo Pasolini sur Accattone. Il travaille aussi plus tard avec Sergio Leone et Dario Argento sur le scénario d'Il était une fois dans l'Ouest. Son second film, Prima della rivoluzione, inspiré de La Chartreuse de Parme de Stendhal, est acclamé par la critique et marque le renouvellement du cinéma d'auteur italien des années 1960. Le thème de l'ambiguïté politique et sexuelle est illustré par une mise en scène revendiquant un certain gongorisme* dans sa sophistication visuelle et son style chorégraphié.

*Le gongorisme est un style littéraire inventé par le poète espagnol Góngora. Propre à la littérature baroque espagnole de la fin du XVIe au XVIIe siècle, il se caractérise par sa préciosité et ses recherches de style, abus d'images, métaphores.

Dans les années 1970, il tourne pour la télévision La Stratégie de l'araignée, d'après Borges. Le Dernier Tango à Paris, interprété par Marlon Brando et Maria Schneider, provoque un scandale en Italie à cause d'une relation très sulfureuse entre un homme mûr et une jeune femme, incluant une scène de sodomie et une séquence où le héros insulte le corps de sa femme défunte.

Bertolucci apparaît dans un documentaire en trois parties, Les Écrivains italiens et l'Italie des écrivains : ombres et questions, dans l'émission Italiques pour parler des relations entre le cinéma et la littérature en 1973 et 1974. Son cinéma à venir se veut fidèle à un certain regard politique. Il reflète en ce sens une vision épique et romanesque mais sans concession de l'histoire italienne (1900, Le Conformiste). La Luna évoque une relation difficile entre une cantatrice et son fils et La Tragédie d'un homme ridicule est une fable pessimiste qui vaut à Ugo Tognazzi le prix d'interprétation masculine à Cannes en 1981.

En 1985 il est membre du jury du 1re Festival international du film de Tokyo.

Il est l'invité de l'Été Cinéma des Rencontres cinématographiques de Digne-les-Bains, à l'initiative de Jean-Pierre Castagna, en 1988. Le Dernier Empereur, tourné en grande partie dans la Cité interdite à Pékin, évoque le destin tragique du tout dernier empereur chinois issu de la dynastie mandchoue : Pu Yi, placé sur le trône à l'âge de trois ans. Triomphe international, le film obtient neuf Oscars, dont ceux du meilleur film et du meilleur réalisateur en 1988. Il est le premier volet d'une trilogie spirituelle et orientale complétée par Un thé au Sahara et Little Buddha.

Bertolucci préside le 43e festival de Cannes où le jury décerne la Palme d'or à Sailor et Lula de David Lynch. Il est également président du jury de la Mostra de Venise à deux reprises : la première fois en 1983 (sous sa présidence, le Lion d'or fut attribué à Prénom Carmen de Jean-Luc Godard), et la seconde, en 2013 (son jury couronna du Lion d'or le documentaire Sacro GRA de Gianfranco Rosi).

En 2011, il reçoit, des mains de Gilles Jacob, la Palme d'honneur à Cannes pour l'ensemble de son œuvre.

En 2013, il avoue dans une entrevue vidéo ne pas avoir prévenu Maria Schneider, lors du tournage du Dernier Tango à Paris, du déroulement de la scène qui ferait scandale, parce qu'il voulait capturer sa réaction « en tant que fille et non en tant qu'actrice ». Elle assimila cette scène à un viol, précisant qu'elle n'avait jamais pardonné à Bertolucci.

Bertolucci meurt d'un cancer le 26 novembre 2018 à 77 ans.

Croyances

Bertolucci était athée.

La politique a une place importante dans ses films. Il était un marxiste avoué. Comme Luchino Visconti, qui engageait les acteurs étrangers à la fin des années 1960, Bertolucci exprimait ses vues politiques à travers ses films; ces derniers sont souvent autobiographiques et très controversés.

Avant de réaliser ses films politiques, il s'est intéressé au sujet de réévaluation de l’histoire. Son film Le Conformiste (1970) critique l’idéologie fasciste, évoque les thèmes de la nation et du nationalisme, les questions de la culture populaire et de mémoire collective. Le film 1900 évoque, de manière théâtralisée, la bataille entre les Gauches et les Droites.

Le 27 septembre 2009, Bertolucci fait partie des signataires de l'appel au gouvernement suisse pour libérer Roman Polanski, qui était détenu en attente d'extradition vers les États-Unis.

Sur Twitter le 24 avril 2015, Bertolucci a participé à whomademyclothes, la campagne de Fashion Revolution qui lutte contre les ateliers de misère, commémorant l'effondrement du Rana Plaza en 2013, l'accident le plus meurtrier dans l'histoire de l'industrie du vêtement.

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Jacques Becker

Jacques Becker est un réalisateur français, né le 15 septembre 1906 à Paris 1er, où il est mort le 21 février 1960 d'une hémochromatose. Il est le père du réalisateur Jean Becker.

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Biographie

Le père de Jacques Becker est administrateur de la société Fulmen, et sa mère, d'origine anglaise, tient une maison de couture à Paris, rue Cambon, près de la maison Chanel. La famille se rend régulièrement en vacances à Marlotte-sur-Loing et fréquente Paul Cézanne, le fils du peintre. Au cours d'un de ces séjours, en 1921, Jacques Becker se lie d'amitié avec Jean Renoir, venu rendre visite aux Cézanne. Le jeune homme, de douze ans son cadet, est alors autant passionné de jazz que de cinéma et fréquente assidûment Le Bœuf sur le toit, où se produit Jean Wiener. Il s'est d'ailleurs fait engager comme steward sur les paquebots qui font la traversée le Havre-New York, pour rencontrer des jazzmen américains. Au cours d'un de ces voyages, en 1928, il fait la connaissance de King Vidor, qui souhaite l'engager comme acteur, mais le jeune homme s'intéresse plus précisément à la mise en scène. Jacques Becker s'est marié et son père l'a fortement incité à rejoindre la compagnie où il travaille, mais le jeune homme s'y morfond. Il profite d'une de ses absences pour donner sa démission, et le hasard fait que le jour même, il retrouve Jean Renoir en tournage en extérieurs pour La Chienne. Il lui demande alors de l'engager et devient, en 1931, son assistant. Jacques Becker souhaite ardemment réaliser et tourne avec Pierre Prévert un court métrage intitulé Le commissaire est bon enfant. Il espère passer au long métrage et coécrit, avec Jean Castanier, un scénario intitulé Sur la cour, mais le producteur pressenti, un ami d'enfance, André Halley Desfontaines, inquiet, confie la réalisation du sujet à Jean Renoir. Ce dernier associe alors Jacques Prévert au projet de ce qui deviendra Le Crime de monsieur Lange. Les deux hommes se brouillent ensuite mais se réconcilient pour le tournage de La vie est à nous, Jacques Becker retrouvant sa place de premier assistant auprès de Renoir. En 1938, il parvient enfin à trouver un producteur prêt à financer son premier long métrage, L'Or du Cristobal, mais le tournage est interrompu, faute d'argent, Jacques Becker se refusant à bâcler son premier film. Alors qu'il est mobilisé, les producteurs profitent de son absence et confient à Jean Stelli le soin de le terminer. Fait prisonnier de guerre, Jacques Becker est rapatrié à la suite d'une visite de la Croix-rouge. Il revient à Paris et parvient enfin à tourner son premier long métrage, Dernier atout en 1942.

Sous l'Occupation, Jacques Becker réalise trois films de factures très diverses, mais qui imposent un style très découpé et fondé sur une caméra extrêmement mobile : Dernier atout (1942), Goupi Mains rouges (1943) et Falbalas (1945). C'est sur le plateau de Falbalas qu'est par ailleurs entreposé le matériel détourné (caméra et pellicules) qui servira au tournage du film de La Libération de Paris. À la Libération, reconnu pour ses qualités morales, le cinéaste intervient pour défendre Henri-Georges Clouzot devant la commission d'épuration.

Après la guerre, il tourne plusieurs comédies, Antoine et Antoinette (1947), palme d'or au festival de Cannes, Rendez-vous de juillet (1949), prix Louis-Delluc, Édouard et Caroline (1951) et Rue de l'Estrapade (1953), qui le distinguent comme le cinéaste français « par excellence ». Son goût pour l'observation de la société d'après-guerre, son regard sur ses personnages, son talent dans la direction d'acteurs, et l'équilibre entre la justesse psychologique des dialogues et la minutie de sa mise en scène, caractérisent cette série qui met en scène diverses classes sociales. Comédies de couples qui inspireront la série des Doinel réalisée ultérieurement par François Truffaut.

Avec Casque d'or (1952), où Simone Signoret incarne superbement une célèbre prostituée, il réalise une chronique rigoureuse et poétique des bas-fonds parisiens en 1900. Il signe ensuite le prototype du film noir français, Touchez pas au grisbi (1954), d'après le roman d'Albert Simonin ; le film relance la carrière de Jean Gabin. Après Ali Baba et les quarante voleurs (1954), une farce tournée pour Fernandel, et une adaptation de Maurice Leblanc, Les Aventures d'Arsène Lupin (1957), avec Robert Lamoureux dans le rôle du gentleman cambrioleur, il réalise avec Montparnasse 19 (1958), un mélodrame où Gérard Philipe incarne de façon pathétique le peintre Modigliani.

En 1957, il épouse l'actrice Françoise Fabian, avec qui il partagera sa vie jusqu'à sa mort, survenue en février 1960, alors qu'il vient de terminer le montage de l'un de ses plus beaux films, Le Trou (1960), film de moraliste, à la rigueur et la sobriété intenses.

Jacques Becker est mort des suites d'une hémochromatose. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse (22e division) à Paris.

Considération critique

Il est à noter que c'est dans un article sur Ali baba et les Quarante Voleurs que François Truffaut, à l'époque critique aux Cahiers du cinéma, aurait pour la première fois utilisé l'expression « politique des auteurs ». Il écrit ainsi : « Ali Baba eût-il été raté que je l'eusse quand même défendu en vertu de la Politique des Auteurs [...]. En dépit de son scénario trituré par dix ou douze personnes, dix ou douze personnes de trop excepté Becker, Ali Baba est le film d'un auteur, un auteur parvenu à une maîtrise exceptionnelle, un auteur de film. »

Bertrand Tavernier, dans son documentaire Voyage à travers le cinéma français, rend hommage à Becker dont il considère qu'il est l'un des plus grands réalisateurs français et qu'il qualifie de « cinéaste de la décence ordinaire, cette notion si chère à George Orwell, qui implique une pratique ordinaire de l’entraide, de la confiance mutuelle, des liens sociaux minimaux, mais fondamentaux ; non pas une morale, mais un sens spontané de ce qui doit se faire ou ne doit pas se faire. »

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Robert Bresson

Robert Bresson est un cinéaste français, né le 25 septembre 1901, à Bromont-Lamothe (Puy-de-Dôme) et mort le 18 décembre 1999 à Droue-sur-Drouette (Eure-et-Loir).

Il a réalisé treize longs métrages et a rédigé un essai important sur le cinéma intitulé Notes sur le cinématographe. Il a notamment reçu le prix de la mise en scène du Festival de Cannes en 1957 pour Un condamné à mort s'est échappé, le Grand prix de création en 1983 pour L'Argent, le prix du jury en 1962 pour Procès de Jeanne d'Arc, l'Ours d'argent au Festival de Berlin pour Le Diable probablement en 1977, et le Lion d'honneur à la carrière en 1989 au Festival de Venise.

Robert Bresson veut d'abord être peintre. Il réalise un premier court-métrage en 1934, Affaires publiques, redécouvert dans les années 1980.

Au début de la Seconde Guerre mondiale, il est prisonnier pendant plus d'un an dans un camp allemand.

En 1943, il réalise son premier long métrage, Les Anges du péché. Puis, c'est une lecture de Jacques le Fataliste de Denis Diderot qui lui inspire Les Dames du bois de Boulogne en 1945, avec des dialogues de Jean Cocteau. Déçu dans ses deux premiers longs-métrages par le jeu des actrices comme Maria Casarès, il décide de ne plus faire appel qu'à des acteurs non professionnels qu'il nomme ses « modèles ».

Bresson a estimé que Les Dames du bois de Boulogne était trop « joué » alors que Maria Casarès, au contraire, ne le trouve justement pas assez joué. Le film est remarquable par le décalage du son sur l'image : lorsque Maria Casarès raccroche le téléphone et annonce sa vengeance, le son des claquettes se fait entendre, puis l'image d'Agnès (Élina Labourdette) dansant, apparaît, Agnès qui sera le moyen de cette vengeance. Cette technique aujourd'hui courante était à l'époque inédite.

En 1951, sort Journal d'un curé de campagne adapté du roman de Bernanos. L'adaptation de ce roman permet à Bresson d'affiner son style : il montre la vie, ou plutôt le chemin de croix, du jeune curé d'Ambricourt, juste sorti du séminaire, atteint d'un cancer de l'estomac dans une paroisse qui lui est hostile. Le film se compose de petites scènes de la vie quotidienne (Bresson filme un tonneau, du pain…) reliées entre elles par les mots (écrits ou en voix off) du curé sur son journal, modeste cahier d'écolier, qui ouvre le film. On retrouve ce principe, par la suite dans Pickpocket ou dans Un condamné à mort s'est échappé.

En 1956, Bresson présente à Cannes Un condamné à mort s'est échappé ou Le vent souffle où il veut, tiré du récit d'André Devigny, et remporte le prix de la mise en scène. Le récit de l'évasion de Fontaine, résistant à Lyon interné à la prison Montluc, est raconté en détail à travers ses moindres gestes. La précision chirurgicale de la préparation de l'évasion et l'insistance sur les gestes en font un film à part. La Messe en ut mineur de Mozart souligne la répétition de la vie quotidienne. Pourtant, Fontaine n'est pas décrit comme un saint, il est prêt à tuer Jost son camarade de cellule et un gardien allemand. De plus, le parcours de Fontaine n'est pas uniquement une évasion sinueuse de nuit dans une prison mais également un itinéraire spirituel pour atteindre la liberté : un pasteur et un prêtre sont également enfermés et soutiennent Fontaine. Le sous-titre, tiré de l'entretien entre Jésus et Nicodème, vient d'un passage de l'Évangile selon Jean. C'est un grand succès public et critique.

Bresson réalise en 1959, Pickpocket. Il montre le « drôle de chemin » de Michel, pickpocket persuadé que certains hommes devraient avoir le droit de se mettre au-dessus des lois. La musique de Lully accompagne le film. Le texte en pré-générique annonce : « Ce film n'est pas du style policier. L'auteur s'efforce d'exprimer par des images et des sons le cauchemar d'un jeune homme poussé par sa faiblesse dans une aventure de vol à la tire pour laquelle il n'était pas fait. Seulement cette aventure par des chemins étranges réunira deux âmes qui sans elle ne se seraient jamais connues. »

En 1962, Bresson réalise Procès de Jeanne d'Arc, inspiré des minutes du procès et du procès de révision survenu vingt-cinq ans plus tard.

En 1963, Bresson est appelé par le producteur Dino De Laurentiis pour réaliser un projet qui lui tient à cœur, La Genèse. De Laurentiis veut une superproduction biblique dont les épisodes seraient réalisés par de prestigieux réalisateurs. Bresson a déjà écrit un scénario sur ce thème en 1952. Mais pour l'arche de Noé, malgré tous les animaux apportés pour le tournage, le cinéaste ne veut filmer que des empreintes. Les divergences artistiques, notamment sur la couleur de peau d'Ève, font renvoyer Bresson du projet une heure plus tard, selon Bernardo Bertolucci qui était présent. Cette grande fresque sera réduite finalement au seul film de John Huston. À plusieurs reprises, Bresson a voulu adapter la Genèse, sans trouver les fonds nécessaires à cette entreprise. Un statut de pré-production parait en 1985, mais ne se concrétise pas.

En 1966, il signe avec Au hasard Balthazar un chef-d'œuvre et son film dramatiquement le plus complexe. Jean-Luc Godard, dans un entretien réalisé peu après la sortie du film, qualifiera celui-ci de « film-monde », car il réunissait en son sein toutes les facettes de la vie. À travers la vie et la mort de l'âne Balthazar, Bresson tisse une métaphore de la présence du mal dans le monde. Le titre Au hasard Balthazar est une référence à la devise des comtes de Baux, qui se disaient descendants du roi mage Balthazar.

En 1967, il réalise "Mouchette", adaptation du roman de Nouvelle histoire de Mouchette de Georges Bernanos.

En 1969, Bresson tourne son premier film en couleurs, Une femme douce, dont la photo est assurée par Ghislain Cloquet, qui avait réalisé les noir-et-blanc de Mouchette et Au Hasard Balthazar. Le film s'ouvre sur le suicide d'une jeune femme dont le châle vole au-dessus de la rue. Son mari se remémore leur rencontre et leur vie de couple. L'adaptation de cette nouvelle de Dostoïevski est l'occasion pour Bresson de décrire la vie de la petite bourgeoisie parisienne et de dénoncer le cinéma (qu'il oppose à son art, le cinématographe) lorsque le jeune couple voit dans une salle obscure Benjamin ou les mémoires d'un puceau de Michel Deville, ou encore lors d'une représentation de Hamlet de Shakespeare. Dominique Sanda interprète son premier rôle dans ce film. Elle est, avec Marika Green, une des rares interprètes de Bresson à avoir ensuite fait carrière à l'écran.

En 1971, il adapte une nouvelle de Dostoïevski pour les Quatre Nuits d'un rêveur avec Isabelle Weingarten et Guillaume Desforêts.

En 1974, il réalise Lancelot du Lac, film au budget assez important sur le retour de Lancelot à la cour du roi Arthur après l'échec de la quête du Graal. Le futur producteur Humbert Balsan joue le rôle de Gauvain. Bresson filme en essayant d'éviter la fausse reconstitution historique. Il montre la vie comme s'il filmait celle d'aujourd'hui et sans magnifier les décors et les costumes.

En 1975, il publie ses Notes sur le cinématographe, un recueil dans lequel il défend sa vision du « cinématographe » qu'il distingue du cinéma. Il pense en effet que le cinéma est du théâtre filmé tandis que le cinématographe invente une écriture nouvelle « avec des images en mouvement et des sons » mis en relation par le montage. Cette notion n'est cependant pas inédite, elle fut déjà utilisée par Marcel L'Herbier qui utilisait le terme de metteur en image, metteur en film ou œuvres ciné phoniques contre celui de metteur en scène théâtral. Même si Bresson voulait évoquer plusieurs aspects de l'industrie en opposant le cinéma.

Avec Le Diable probablement, Robert Bresson obtient l'Ours d'argent au Festival de Berlin en 1977.

Son dernier film, L'Argent, est une adaptation d'une nouvelle de Tolstoï, Le Faux Coupon. Parce qu'un riche fils de famille donne un faux billet de 500 francs à un photographe, un employé entre dans l'engrenage de la prison, du vol, de la déchéance et du meurtre. Sifflé à Cannes, ce film obtient pourtant le grand prix du cinéma de création, en 1983, en ex æquo avec Nostalghia d'Andreï Tarkovski.

En 1995, l'ensemble de son œuvre cinématographique reçoit le prix René-Clair.

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Luc Besson

Luc Besson est un réalisateur, producteur et scénariste français, né le 18 mars 1959 dans le 15e arrondissement de Paris.

Rétrospective 1 (Les premières années) - 2 (A l'assaut des USA) - 3 (Producteur)

Révélé au cours des années 1980 par ses films Le Dernier Combat (1983) et Subway (1985), il s'impose avec Le Grand Bleu (1988), triomphe au box-office. Bien qu'il soit vu comme un réalisateur prometteur du cinéma français, l'esthétique trop travaillée de ses films, au détriment de l'histoire, lui vaut l'inimitié de la critique. Avec l'ouverture internationale que lui apporte Le Grand Bleu, il confirme son succès avec de nouveaux films : Nikita (1990), Léon (1994), Le Cinquième Élément (1997), Jeanne d'Arc (1999).

En lançant sa société de production EuropaCorp en 2000, il tente de rivaliser avec les majors américaines, avec des films produits en France, créés par son écurie de réalisateurs et techniciens français, mais le plus souvent en langue anglaise, avec une vedette internationale étrangère en tête d'affiche. Il produit plusieurs séries de films, fréquemment issues de ses idées, telles que Taxi, Taken, et Le Transporteur, ainsi que la trilogie Arthur et les Minimoys, qu'il réalise, qui connaissent de grands succès commerciaux. Cinéaste déjà clivant, il est décrié pour la qualité de ses productions et réalisations. Il se dote également de ses propres studios, avec la Cité du cinéma.

S'il retrouve le succès international en tant que réalisateur, après plusieurs échecs, avec Lucy (2014), le plus gros succès d'un film français dans le monde (certes non francophone), la superproduction Valérian et la Cité des mille planètes (2017), plus gros budget du cinéma français, est un flop retentissant qui met EuropaCorp en difficulté financière.

Il est le lauréat d'un César du meilleur réalisateur, décerné en 1998 pour Le Cinquième Élément.

Jeunesse et révélation

Luc Paul Maurice Besson, né dans le 15e arrondissement de Paris, et fils d'instructeurs en plongée sous-marine du Club Méditerranée, en Grèce et en ex-Yougoslavie.

Assistant réalisateur, dans le cinéma, en France et aux États-Unis, il met en scène son premier long métrage de science-fiction, coécrit avec Pierre Jolivet sur la survie d'êtres humains dans un monde post-apocalyptique. Le Dernier Combat, tourné en CinémaScope et en noir et blanc (inspiré de La Jetée, de Chris Marker, 1962), est distingué au festival d'Avoriaz en 1983. Il signe un contrat avec Gaumont et réalise, deux ans plus tard, Subway, avec Isabelle Adjani et Christophe Lambert. Récompensé par trois Césars, le film impose un univers proche de la bande dessinée du vidéoclip, surnommé Cinéma du look.

Années 1990

Le Grand Bleu est mal reçu au Festival de Cannes 1988, fait dix millions d'entrées. Son style est proche de l'esthétique publicitaire. Nikita en 1990 et Léon en 1994, lui apportent une notoriété sur le plan international mais Atlantis, en 1991, obtient un succès moindre.

En 1994, lors de la 20e cérémonie des César, il boycotte la cérémonie, à la suite de la remise du César du meilleur film étranger à Quatre mariages et un enterrement de Mike Newell au détriment de La Liste de Schindler de Steven Spielberg.

En 1997, il réalise, avec Gaumont, Le Cinquième Élément, s'installe à Los Angeles avec son épouse, la comédienne Maïwenn, et leur fille Shanna. Les décors et l'apparence des créatures du film sont dessinés par Mœbius et Jean-Claude Mézières, les costumes, par Jean-Paul Gaultier, devenant le plus gros succès commercial d'un film français aux États-Unis (surpassé, depuis, par Taken de Pierre Morel). Il reçoit le César du meilleur réalisateur en 1998.

En 1999, sa version de Jeanne d'Arc, interprétée par sa nouvelle compagne et épouse Milla Jovovich, rassemble trois millions de spectateurs en salles puis se voit confier la présidence du jury au 53e festival de Cannes.

Le cinéaste au Festival de Cannes 2000, où il officie en tant que président du jury.

 

Adaptations littéraires et production (années 2000)

Dans les années 2000, il devient producteur et supervise l'adaptation d'une série de romans pour enfants qu'il co-écrit avec Céline Garcia, sous forme d'une trilogie cinématographique.

Il préside le jury international du 15e festival international du film de Tokyo en 2002, avant le tournage de Angel-A, film expérimental en noir et blanc, avec Jamel Debbouze, sorti en 2005. En 2006, il préside le jury des longs-métrages du Festival international du film de Shanghai.

En 2006, Arthur et les Minimoys rassemble 6 millions de spectateurs français, et s'exporte dans le monde entier mais Arthur et la vengeance de Maltazard, sorti à la fin de l'année 2009, puis Arthur et la guerre des deux mondes, en décembre 2010, n'attirent que la moitié de l'audience du premier.

En 2009, il signe dans le journal Le Monde une tribune pour soutenir le projet de loi « Création et Internet ».

En avril 2010, Besson dévoile une adaptation de la série de bandes dessinées de Jacques Tardi, Les Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec, avec Louise Bourgoin. La même année, il est président du jury du Festival international du film de Moscou.

 

 

Le réalisateur au festival de Cannes 2007

Collaborations hollywoodiennes (années 2010)

En 2010, il tourne The Lady en Thaïlande, sur la vie de la femme politique birmane Aung San Suu Kyi, à l'époque en résidence surveillée et interprétée par Michelle Yeoh. Il dirige ensuite Robert De Niro dans une adaptation du roman Malavita de Tonino Benacquista.

Lucy, avec Scarlett Johansson, alors qu'Angelina Jolie était évoquée depuis le début est tourné en septembre 2013 à Paris, la Cité du cinéma, Étretat et à Taipei. Le film est le plus grand succès d'un long métrage français, toutes langues de tournage prises en compte, avec 459 millions de dollars, devant le précédent détenteur du record, Intouchables (445 millions de dollars ou 449 millions de dollars corrigé de l'inflation). C'est également le deuxième plus grand succès international (non corrigé de l'inflation) d'un film non américain de toute l'histoire, après l'anglais Skyfall (1 108 millions de dollars et juste devant Intouchables (445 millions de dollars).

 

Déclin et échecs (depuis 2017)

En mai 2015, il annonce sur Twitter la sortie de Valérian et la Cité des mille planètes, adapté de la série de bandes dessinées Valérian et Laureline de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières. Les acteurs principaux sont Dane DeHaan et Cara Delevingne. Le film, tourné en France, sort en juillet 2017. Le film déçoit et le directeur général adjoint d'EuropaCorp, Édouard de Vésinne, cède, début septembre, la place à l'Américain Marc Shumger, directeur général.

En octobre 2017, Luc Besson annonce le tournage d'Anna, avec la mannequin Sasha Luss, dirigée dans le rôle de la princesse Lihö-Minaa dans Valérian et la Cité des mille planètes, Helen Mirren, Luke Evans et Cillian Murphy qui ne rencontre pas le succès.

Engagement politique

Dans l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle de 2017 qui oppose Marine Le Pen à Emmanuel Macron, il publie une lettre ouverte sur Facebook, estimant que le FN « regroupe l'élite du fascisme à la française ».

Influences

La critique et plusieurs experts remarquent beaucoup de citations dans ses films venant du cinéma de genre américain même si le réalisateur ne les cite jamais en interview. Les détracteurs font aussi remarquer que le cinéaste utilise des effets présents dans les productions EuropaCorp. Critikat déclare qu'il est impossible de situer Besson dans un courant artistique : « En vérité, Besson avait ce mérite finalement rare d'avoir une vraie singularité, de ne faire des films qui ne correspondaient qu'à son idéal et à rien d'autre ».


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Leos Carax

Leos Carax, de son vrai nom Alex Dupont, né le 22 novembre 1960 à Suresnes, est un réalisateur de cinéma français.

Biographie

Il est le fils de la journaliste américaine et critique de cinéma, Joan Osserman-Dupont (International New York Times) et du journaliste scientifique franco-américain Georges Dupont ami personnel de l'acteur et réalisateur américain Larry Hagman. Il a des origines franco-allemandes par son père, russo-américaines et juives par sa mère. Il est le père de Nastya Golubeva Carax née en 2004.

Son nom d'artiste est une anagramme d'Alex qui est le prénom du personnage principal de la plupart de ses films (et le prénom qui lui a été donné par ses parents) et d'Oscar en référence à l'Oscar du cinéma : « Je suis né en 1976, dans une chambre noire, et ce serait très dur pour moi qu'on me fasse naître avant, sous un nom sorti de paperasses. J'ai fait du cinéma pour être orphelin. Avant, c'était comme si j'avais dormi pendant dix-sept ans », déclare Carax.

Jeunesse

Dès son enfance, Leos Carax apprécie le cinéma et particulièrement « les femmes filmées » : il se passionne notamment pour Marilyn Monroe. Dans le même temps, son parcours scolaire est assez chaotique : « J'étais assez voyou. » Il gagne de l'argent de poche en allant voler des disques au centre commercial de La Défense pour les revendre à ses camarades de lycée, selon les listes de demande qu'ils lui font. C'est ainsi qu'il fait de nombreuses découvertes musicales. Ses idoles rock sont David Bowie et Iggy Pop.

À la fin des années 1970, il suit des cours au centre Censier de l'université Paris III, où il rencontre Serge Daney et Serge Toubiana, qui l'introduisent aux Cahiers du cinéma, où il ne reste que peu de temps. Il commence le tournage d'un film, La fille rêvée, avec de petits moyens ; mais l'entreprise s'achève quand un projecteur cassé met le feu aux rideaux du restaurant chinois où l'une des scènes est tournée.

Premiers films

Il arrive ensuite à terminer Strangulation Blues, un court-métrage de dix-sept minutes, en 1980. Son univers poétique urbain, son style sensible et son lyrisme en font un des réalisateurs français les plus prometteurs au début des années 1980. Il reçoit le Grand Prix du court métrage du Festival international du jeune cinéma de Hyères, en 1981. Il réalise ensuite Boy Meets Girl (1984), avec Denis Lavant et Mireille Perrier. L'intrigue est simple : la nuit, dans une ville, un garçon et une fille déambulent chacun de leur côté, font une série d'étranges rencontres, finissent par faire connaissance, se parlent et tombent amoureux, mais leur rencontre s'achève de manière tragique et brutale. Le film, tourné en noir et blanc, est parsemé de références notamment à Jean-Luc Godard, Jean Cocteau et D. W. Griffith, et sera remarqué pour son ton poétique et l'énergie de sa mise en scène. Le film est présenté à la Semaine de la critique au Festival de Cannes 1984. Libération écrit à l'époque : « Un frêle fantôme hante tout le festival. »

Il réalise ensuite Mauvais Sang en (1986), avec Denis Lavant, Juliette Binoche tout juste révélée dans Rendez-vous d'André Téchiné, et Michel Piccoli, poème d'amour lyrique niché dans un polar. C'est l'histoire d'Alex, jeune homme engagé par des gangsters pour un casse, qui tombe amoureux d'Anna, la maîtresse du chef. Le titre est une référence au poème Mauvais Sang qui ouvre Une saison en enfer d'Arthur Rimbaud.

Reconnaissance

Leos Carax s'attaque ensuite à un projet ambitieux à gros budget, Les Amants du Pont-Neuf, avec son acteur fétiche Denis Lavant et sa compagne Juliette Binoche. À la suite d'un accident, les problèmes se multiplient, le tournage doit s'interrompre à plusieurs reprises. Carax doit l'achèvement de son film au soutien d'un grand nombre de cinéastes français et étrangers et d'une grande partie de la communauté cinéphile et artistique, ainsi qu'à l'appui du ministre de la Culture Jack Lang, ce qui finira par susciter l'intervention du producteur Christian Fechner. En 1991, Les Amants du Pont-Neuf est néanmoins un succès critique, malgré le demi-échec public en France, mais son équipe se sépare et Juliette Binoche le quitte.

Il faut attendre 1999 pour que sorte Pola X, interprété par Guillaume Depardieu, Katerina Golubeva et Catherine Deneuve, mal accueilli par la presse et le public (sélection officielle à Cannes), mais soutenu ardemment par quelques-uns, notamment par le cinéaste Jacques Rivette qui déclare : « Pour moi, le plus beau film français des dix dernières années ». Une version légèrement plus longue diffusée à la télévision sur Arte, en 2002, sous le titre Pierre ou les Ambiguïtés (titre du livre de Herman Melville dont le film est inspiré) reçoit un jugement plus favorable. Le titre du film fait aussi référence à l'actrice de cinéma muet Pola Negri, Léos Carax ayant pensé renommer le personnage féminin par le prénom Pola.

En décembre 2004, Leos Carax obtient une rétrospective et une carte blanche à la Cinémathèque française où il programme quatorze œuvres, parmi lesquelles : Après nous le déluge de Howard Hawks (1933), Fleurs de papier de Guru Dutt (1959), La Foule de King Vidor (1928), La Petite Lise de Jean Grémillon (1930) et Le Soldat américain de Rainer Werner Fassbinder (1970).

Fin 2007, il réalise au Japon Merde, un des trois segments du long métrage Tokyo! réalisé aussi par Bong Joon-ho et Michel Gondry.

En 2012, Leos Carax fait son grand retour, treize ans après son dernier long métrage, avec Holy Motors, toujours interprété par Denis Lavant. Le film présenté en sélection officielle au Festival de Cannes reçoit un accueil globalement très enthousiaste, qui le place quelques jours avant l'annonce du palmarès en favori pour gagner la Palme d'or, malgré quelques réticences sur l'aspect extrêmement novateur du film. Il ne gagne finalement aucun prix du Palmarès officiel, mais il est considéré par de nombreux critiques de cinéma comme l'un des meilleurs films de la sélection cannoise de cette édition. Cette même année, Carax se rend au festival du film de Locarno en Suisse, où il reçoit un Léopard d'or pour l'ensemble de sa carrière et à cette occasion, ses cinq longs métrages sont projetés. Olivier Père, directeur artistique du festival, se déclare « très ému et honoré d'inviter à Locarno l'un des plus grands créateurs du cinéma mondial. Les apparitions Boy Meets Girl et Mauvais Sang demeurent les plus probants manifestes esthétiques des années 80, Les Amants du Pont-Neuf un rêve de cinéma poétique à l'ambition inégalée, tandis que Pola X, d'une beauté, d'une sincérité et d'une ampleur bouleversantes, est sans doute le chef-d'œuvre de Leos Carax. Quant à Holy Motors, il s'agit d'un fulgurant voyage où se mêlent la vie et le cinéma, au gré d'émotions et de visions extraordinaires ».

En 2014, la Galerie Gradiva à Paris demande au réalisateur de créer quelques minutes de cinéma à propos du Penseur d'Auguste Rodin.

Carax est le plus grand poète français vivant. Il ne se passe pas un soir où, en traversant la Seine par le pont du Carrousel, je ne pense pas aux plans magiques des Amants du Pont-Neuf. Je lui ai demandé de filmer le Penseur. Et il a pensé que c’était une bonne idée , raconte le galeriste Thomas Bompard.

Éclairé par Caroline Champetier, avec qui Carax avait déjà collaboré sur Holy Motors, ce court métrage est projeté en avant-première le soir du vernissage, le 27 mai, à la tombée de la nuit.

Leos Carax prépare en 2017 son sixième long-métrage. Cet opéra rock intitulé Annette sera son premier film en langue anglaise et mettra en scène Adam Driver. La musique sera composée par les Sparks.

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René Clément

René Clément, né le 18 mars 1913 à Bordeaux et mort le 17 mars 1996 à Monaco, est un cinéaste et réalisateur.

Il est le seul réalisateur français à avoir remporté deux fois l'Oscar du meilleur film en langue étrangère, pour Au-delà des grilles (1951) puis pour Jeux interdits (1953).

René Clément, fils du décorateur Maurice Clément, fréquente le lycée de Bordeaux et l’École des Beaux-Arts à Paris, où il étudie l’architecture. Après la mort de son père, il interrompt ses études et se consacre au cinéma, par lequel il est déjà passionné à l’adolescence.

En 1934, il rencontre Jacques Tati et commence à travailler avec lui. Il fait son service militaire au Service cinématographique de l’Armée. Il réalise son premier court-métrage avec Jacques Tati, une comédie légère, Soigne ton gauche en 1936. Ensuite, pendant les années trente, il tourne des films documentaires. En 1937, il voyage avec l’archéologue Jules Barthoux au Yémen pour tourner un documentaire sur ce pays. Il est atteint du typhus et même incarcéré à plusieurs reprises.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il continue à se consacrer aux documentaires, jusqu’à ce qu’en 1945 la coopérative générale du cinéma français le choisisse pour réaliser La Bataille du rail. Un an plus tard, son premier long-métrage sort dans les salles et connaît le succès, ce qui lance la carrière de René Clément. Le film met en scène la résistance des cheminots pendant l’Occupation allemande, valant à son auteur le prix du jury au Festival de Cannes de 1946. Clément devint un des metteurs en scène français les plus en vue de l’après-guerre. Six ans plus tard suit son probable plus gros succès, Jeux interdits (1952), qui remporte le Lion d'or à Venise et l’Oscar du meilleur film en langue étrangère.

L’œuvre de René Clément est souvent controversée par les jeunes auteurs de la Nouvelle Vague. Malgré ses constantes innovations de tournage, notamment les prises de vues en extérieurs urbains (à Londres, à Gênes) où les comédiens jouent devant des caméras dissimulées, innovation qui donne une vérité et une dimension documentaire à plusieurs de ses films. Il endure des critiques très agressives de la part de François Truffaut, en contradiction pour une fois avec André Bazin. Clément en restera blessé et amer, considérant que sa carrière en a été limitée, à l'instar de nombre d'autres réalisateurs (Jean Delannoy, Claude Autant-Lara) eux aussi ciblés par les critiques des Cahiers du cinéma.

Pour chacun de ses nouveaux films il utilise un style différent : de l’adaptation littéraire comme Gervaise (1956, d’après le roman L’Assommoir d’Émile Zola) ou Plein Soleil (1960 d’après le roman Monsieur Ripley de Patricia Highsmith), des thrillers comme Le passager de la pluie (1969) ou La Course du lièvre à travers les champs (1972), jusqu’au drame psychologique comme Les Félins (1962) et des souvenirs de la Seconde Guerre mondiale avec Paris brûle-t-il ? (1966).

En 1982, Alain Delon réalise un film intitulé Le Battant, il le dédie à celui qu'il appelle son maître : René Clément.

« Chacun de mes films est la somme de tout ce que j'ai appris auparavant dans tous les domaines », déclarait René Clément. Membre fondateur de l'Institut des Hautes Etudes Cinématographiques (IDHEC), ce touche-à-tout est élu à l'Académie des beaux-arts au fauteuil du sculpteur Georges Hilbert, fauteuil transféré à la section cinéma et audiovisuel à la création de cette dernière en 1985. René Clément est président de l'Académie et de l'Institut en 1990. Gérard Oury lui succède en 1998, deux ans après sa mort, et prononce son éloge sous la Coupole en 2000.

Il meurt le 17 mars 1996, à Monaco, la veille de son 83e anniversaire.

En 2013, la Cinémathèque française lui rend hommage pendant toute la durée du mois de juin, avec une projection complète de son œuvre y compris les courts-métrages, la restauration de plusieurs films en copie neuve, une table ronde et la projection du documentaire d'Alain Ferrari.

Il reste, à ce jour, le cinéaste français le plus primé du Festival de Cannes avec cinq récompenses obtenues entre 1946 et 1954.

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Henri-Georges Clouzot

Henri-Georges Clouzot, né le 20 novembre 1907 à Niort et mort le 12 janvier 1977 dans le 17e arrondissement de Paris, est un scénariste, dialoguiste, réalisateur et producteur de cinéma français.

Il est surtout connu pour son travail dans le genre du film noir, après avoir tourné Le Salaire de la peur et Les Diaboliques, placés par la critique au nombre des plus grands films des années 1950. Il réalise également des documentaires, dont Le Mystère Picasso, déclaré trésor national par le gouvernement français.

Henri-Georges Clouzot est l'un des trois cinéastes, avec Michelangelo Antonioni et Robert Altman, à avoir remporté les trois récompenses suprêmes des principaux festivals européens à savoir le Lion d'or, la Palme d'or et l'Ours d'or, bien que ces deux dernières récompenses aient été attribuées à un seul et même film (en l'occurrence Le Salaire de la peur), ce qui n'est plus possible aujourd'hui.

Henri-Georges Clouzot est né à Niort, le 20 novembre 1907 où son père Georges a repris la librairie paternelle. Après la faillite de la librairie, la famille s'installe en 1922 à Brest où son père devient commissaire-priseur. Ses parents se séparent.

Son oncle Henri (1865-1941) est conservateur de la bibliothèque Forney puis du musée Galliera à Paris. Historien du Poitou, il écrit aussi de nombreux livres sur l'art et notamment sur l'art africain (L'art du Congo belge 1921).

Son autre oncle; Étienne Clouzot (1881-1944), diplômé de l'École nationale des chartes est un archiviste-paléographe français. Son épouse Jeanne Clouzot-Régnier (1882-1965) a été, au Journal de Genève de 1924 à 1964, la première critique de cinéma professionnelle en Suisse.

Son frère, Marcel Clouzot (1916-2016), était un libraire ancien réputé et auteur du Guide du bibliophile français qui recense notamment les éditions originales du XIXe siècle.

Carrière

Adolescent, il ambitionnait de devenir marin, comme son grand-père maternel, mais une myopie de l'œil gauche lui ferme les portes de l'École navale. Après une année de maths-spé au Lycée Sainte-Barbe, il entre à l'École libre des sciences politiques. Il devient l'assistant du député Louis Marin, puis entre à la rédaction des journaux Paris-Midi et Paris-Soir sur les recommandations de son ami Pierre Lazareff. Passionné par la chanson, il soumet ses textes à René Dorin, interprète et parolier, entre autres, de Maurice Chevalier, qui l'engage comme secrétaire pour deux ans. Auprès de Dorin, Clouzot fait la rencontre d'autres chansonniers : Pierre Varenne, Saint-Granier, Mauricet3.

Henri-Georges s'associe à Henri Decoin pour un premier essai de scénario destiné à Mauricet ; le producteur Adolphe Osso refuse finalement le projet mais engage Clouzot et l'envoie aux studios de la Babelsberg, à Berlin, où il devient l'assistant d'Anatole Litvak et supervise les versions françaises d'opérettes allemandes, puis écrit des scénarios pour Jacques de Baroncelli, Carmine Gallone ou Victor Tourjanski.

Il enchaîne avec deux adaptations : Les Inconnus dans la maison d'Henri Decoin avec Raimu, d'après le roman éponyme de Georges Simenon et Le Dernier des six de Georges Lacombe avec Pierre Fresnay et Suzy Delair, sa compagne, d'après Stanislas-André Steeman (qu'il adaptera deux fois encore pour L'assassin habite au 21 et Quai des Orfèvres).

Il écrit quatre pièces entre 1940 et 1943. Il débute réellement dans la mise en scène en 1942, bénéficiant de l'exil aux États-Unis des grands réalisateurs comme Jean Renoir, Julien Duvivier, René Clair… avec L'assassin habite au 21 et reforme le couple Pierre Fresnay-Suzy Delair. Il réalise ensuite, en pleine occupation allemande, un film sur un expéditeur de lettres anonymes Le Corbeau (1943), qui donne lieu à de vives polémiques dans une France qui souffre alors de la délation. Le scénario est de Louis Chavance d'après un fait divers qui s'était passé à Tulle dans les années 1920. Une campagne communiste est lancée contre Clouzot, comparant son film à Mein Kampf, l'accusant d'offrir une image négative de la France, alors que dans le même temps son film est condamné par les conservateurs et la Centrale catholique pour immoralité, tandis que Goebbels le fait diffuser à l'étranger. À la Libération, contrairement à la plupart des autres employés de la Continental-Films, une entreprise créée par Joseph Goebbels, Clouzot échappe à la prison, mais se voit frappé d'une suspension professionnelle à vie. Henri Jeanson écrit alors à un détracteur de Clouzot : « Mon cher, tu sais bien que Clouzot n'a pas plus été collabo que toi tu n'as été résistant. »

En 1948, le film est interdit au Canada, puis accepté à la suite de plusieurs coupures.

Grâce à l'intervention de personnalités comme Pierre Bost, Jacques Becker ou encore Henri Jeanson qui signe un texte corrosif « Cocos contre corbeau », Clouzot revient à la réalisation et remporte plusieurs récompenses aux festivals de Venise, de Berlin et de Cannes avec Quai des Orfèvres en 1947 (où il offre pour la dernière fois un rôle à Suzy Delair), Miquette et sa mère en 1949, tous les deux avec Louis Jouvet, Manon (1949) (d'après Manon Lescaut de l'abbé Prévost), Le Salaire de la peur (d'après le roman de Georges Arnaud), avec Yves Montand et Charles Vanel en 1952, films ayant tous bénéficié d'une large audience. Il fut surnommé plus tard le « Hitchcock français ».

Ses trois premiers films trahissent l'influence du cinéma expressionniste, et surtout de Fritz Lang. Il est animé par une sorte de perfectionnisme, qui le conduit parfois à tyranniser ses acteurs. Moraliste jetant un regard souvent pessimiste sur la société, il est le réalisateur de plusieurs autres films célèbres dont Les Diaboliques (1954), film policier haut en suspense, mettant en scène un couple ambivalent et ambigu interprété par Simone Signoret et Véra Clouzot, soupçonnées du meurtre du mari de cette dernière (Paul Meurisse) par un commissaire à la logique implacable (Charles Vanel) ; Le Mystère Picasso (1956), un grand documentaire sur la méthode du peintre et sur la naissance de quelques-uns de ses tableaux ; et La Vérité (1960) avec Brigitte Bardot.

À la suite du décès de sa femme Véra en 1960, il connait une période de dépression durant laquelle il se retire à Tahiti. A son retour, il écrit l'ambitieux projet de L'Enfer qui devrait, selon lui, révolutionner le cinéma. Il propose à Romy Schneider et Serge Reggiani d'en jouer les premiers rôles. Mais, en 1964, malgré un budget illimité de la part de la Columbia, le tournage se passe très mal, Clouzot, très fatigué, fait un infarctus.

Après La Prisonnière (1968), aucune compagnie d'assurances n'accepte de garantir le risque d'un nouveau problème de santé; Henri-Georges Clouzot n'arrivera plus à concrétiser aucun projet. Il meurt le 12 janvier 1977. Il est enterré à Paris, au cimetière de Montmartre; sa deuxième épouse, Inès Clouzot, l'y rejoindra en février 2011.

Dans les années 1990, Claude Chabrol reprit le scénario de L'Enfer, que Clouzot n'avait pu achever trente ans plus tôt, et parvint à sortir sa propre version de L'Enfer en 1994, avec François Cluzet et Emmanuelle Béart.

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Julien Divivier

Julien Duvivier, né le 8 octobre 1896 à Lille et mort le 29 octobre 1967 à Paris, est un réalisateur français.

Il a marqué le cinéma français de la période 1930-1960. Parmi ses films les plus originaux, figurent notamment Pépé le Moko, Panique et Voici le temps des assassins.

Célèbre pour sa noirceur et son pessimisme, il connut cependant l'un de ses plus grands succès publics avec son Don Camillo.

Les premières armes

Fils d'un chef de fabrication, Julien Duvivier naît le 8 octobre 1896 à Lille.

Il fait ses débuts, sur les conseils de Pierre Bertin, en tant qu'acteur de théâtre, en 1916, à l'Odéon, sous la direction d'André Antoine. Celui-ci lui conseille de s'orienter vers le cinéma, muet à l'époque. C'est ce qu'il fait en entrant, en 1918, chez Gaumont en tant que scénariste et assistant auprès de Louis Feuillade, André Antoine et Marcel L'Herbier ; puis, bien vite, en tant que réalisateur.

C'est, en 1919, Haceldama ou le prix du sang, un western tourné en Corrèze3 qui ne connaît pas un grand succès.

Les années 1920, les débuts

Dans les années 1920, plusieurs de ses films traitent de sujets religieux, Credo ou la Tragédie de Lourdes (scénario Georges d'Esparbès), L'Abbé Constantin ou encore La Vie miraculeuse de Thérèse Martin. Sa filmographie n'est, cependant, jamais cantonnée dans une thématique particulière. Et, en 1926, il tourne L'Homme à l'Hispano avec Georges Galli.

Les années 1930, l’âge d’or

Dans les années 1930, Duvivier entre, pour neuf ans, au service de la société de production Film d'Art, fondée par Marcel Vandal et Charles Delac, où il pratique le travail d'équipe. Avec David Golder, en 1931, son premier film parlant et la première expérience du parlant pour Harry Baur, il connaît son premier succès.

En 1934, Maria Chapdelaine marque sa première collaboration avec Jean Gabin. Puis, avec La Bandera, en 1935, il s’attache les talents du dialoguiste Charles Spaak, auparavant collaborateur de Feyder, Grémillon, Allégret et L'Herbier, avec lequel il travaille souvent. Il tourne, toujours en 1935, Golgotha, vision originale de la Passion du Christ.

Après le tournage du Golem, en 1936, film fantastique, il entreprend le tournage de La Belle Équipe, avec Jean Gabin, Charles Vanel et Raymond Aimos, une œuvre phare, témoin de l'esprit du Front populaire, où cinq traîne-savates, ayant gagné à la loterie, achètent une guinguette au bord de l’eau. La fin ayant été jugée trop pessimiste, les producteurs imposent, au grand dam de Duvivier, un dénouement plus heureux. Si les deux fins existent toujours, c'est la version optimiste qui fut exploitée en salle.

Trois films s’enchaînent ensuite : L'Homme du jour, en 1936, film mineur avec Maurice Chevalier, puis Pépé le Moko et Un carnet de bal, en 1937, deux chefs-d'œuvre. Pépé le Moko, qui nous plonge dans la pègre d’Alger, propulse Jean Gabin au rang de vedette internationale.

En 1938, Duvivier tourne pour la MGM aux États-Unis une biographie de Johann Strauss, The Great Waltz.

En 1939, de retour en France, il met en scène La Fin du jour dans lequel des acteurs de théâtre à la retraite luttent pour sauver leur maison de retraite. On y retrouve Michel Simon, en vieil acteur cabotin, et Louis Jouvet, en vieux « jeune premier » qui croit encore en son pouvoir de séduction. C’est sans doute le film le plus émouvant du réalisateur et, selon ses dires, son préféré. Duvivier enchaîne ensuite La Charrette fantôme, film fantastique adapté du roman de Selma Lagerlöf, et, en 1940, Untel père et fils avec Raimu, Michèle Morgan et Louis Jouvet, une chronique familiale qui ne peut être projetée en France qu’à la fin de guerre. Ce film, malgré sa distribution, est considéré comme mineur, voire raté.

La Seconde Guerre mondiale – période américaine

Durant la Seconde Guerre mondiale, contrairement à Marcel Carné qui poursuit sa carrière en France, Julien Duvivier part à nouveau travailler aux États-Unis pour y réaliser cinq films : Lydia, en 1941 ; deux films à sketches : Six destins avec Charles Boyer et Rita Hayworth, en 1942, et Obsessions, en 1943, avec Edward G. Robinson, Charles Boyer et Barbara Stanwyck ; puis L'Imposteur, en 1943, avec Gabin et Destiny, en 1944.

L’après-guerre

À son retour en France, Duvivier éprouve quelques difficultés à renouer avec le succès des années 1930. En 1946, sort Panique, adapté du roman Les Fiançailles de monsieur Hire de Georges Simenon. Le film, condensé des instincts les plus vils de la nature humaine, reste l’œuvre la plus personnelle et la plus noire de son auteur. C'est pourtant un échec cuisant, tant critique que public, la critique lui reprochant une volonté de retour au réalisme poétique d’avant-guerre. Duvivier continue cependant, après un court détour en Grande-Bretagne, en 1948, pour Anna Karénine et un tournage en Espagne pour Black Jack, en 1950, à tourner en France.

En 1951, il réalise Sous le ciel de Paris, film d’une grande originalité où, au cours d’une même journée, on suit, à Paris, des personnages dont les destins se croisent. La même année 1951, Duvivier tourne le premier volet des Don Camillo, Le Petit Monde de don Camillo, qui rencontre un succès populaire immédiat et auquel il donne lui-même une suite, Le Retour de don Camillo, en 1953. La série se prolonge sous la direction d’autres réalisateurs. En 1952, il tourne La Fête à Henriette, mise en abîmes d'un film en train de se faire dans lequel il s'autoparodie en compagnie d'Henri Jeanson.

Dans Voici le temps des assassins, en 1956, on retrouve Jean Gabin dans le rôle d’un brave restaurateur qui se fait gruger par une jeune femme cynique jouée par Danièle Delorme. Un film noir et un portrait de femme démoniaque. Duvivier tourne un autre grand film en 1958, Marie-Octobre, avec Danielle Darrieux, Paul Meurisse, Serge Reggiani et Bernard Blier. Un exercice de style où onze personnages (neuf hommes et deux femmes) évoluent dans une unité de lieu, de temps et d'action avec une mise en scène omniprésente, inquisitrice, presque menaçante dans un souci constant du cadrage et de la composition de l'image. La même année, le metteur en scène est invité à participer au jury du Festival de Cannes.

En 1962, il se livre une dernière fois à l’exercice du film à sketches avec Le Diable et les Dix Commandements. L’année suivante, en 1963, sort Chair de poule, dont le scénario est adapté du roman Tirez la chevillette (Come Easy, Go Easy, 1960) de James Hadley Chase et dont l'intrigue présente bien des similitudes avec celle du Facteur sonne toujours deux fois. Une fois de plus, Duvivier y présente un personnage de garce sans scrupule.

Mort

En octobre 1967, alors que la production de Diaboliquement vôtre, dans lequel un homme perd la mémoire à la suite d’un accident de voiture, s’achève, Duvivier est épuisé. Il meurt le 29 octobre 1967 au sein de l'Hôpital Boucicaut dans le 15e arrondissement de Paris où il n'a pas pu être réanimé6 après une crise cardiaque au volant de sa voiture. Il est âgé de 71 ans et laisse derrière lui une filmographie riche de près de 70 titres, parmi lesquels d’incontournables classiques du cinéma mondial. Il est enterré au cimetière ancien de Rueil-Malmaison dans les Hauts-de-Seine9. Son épouse Olga était morte en 1955.

Thèmes récurrents

Héritage

Jean Renoir a dit au sujet de Duvivier : « Si j'étais architecte et devais construire un monument du cinéma, je placerais une statue de Duvivier au-dessus de l'entrée. Ce grand technicien, ce rigoriste, était un poète. » Outre Jean Renoir, notamment Ingmar Bergman et Orson Welles tenaient Duvivier en haute estime.

Duvivier est l'inventeur d’un univers d’images où le réalisme le plus cru et souvent très noir est pénétré d’une fantaisie insolite. Après la Seconde Guerre mondiale, il donne une représentation tout aussi pessimiste de la société française, qu'il montre dominée par l'hypocrisie, le cléricalisme étroit, la mesquinerie et la rouerie féminine.

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Werner Herzog

Werner Herzog, de son nom complet Werner Herzog Stipetić, est un réalisateur, acteur et metteur en scène allemand né le 5 septembre 1942 à Munich (Allemagne).

Il est l'un des représentants majeurs du nouveau cinéma allemand des années 1960–1970.

 

Biographie

Né à Munich en 1942, Werner Herzog passe sa petite enfance dans un petit village bavarois, puis son adolescence à Munich. Il poursuit des études littéraires à l'université Louis-et-Maximilien de Munich. En 1963, il crée sa maison de production, la Werner Herzog Filmproduktion. Il commence à réaliser ses premiers courts métrages.

En 1968, il réalise son premier long métrage, Signes de vie (Lebenszeichen), qui remporte l'Ours d'argent au festival de Berlin. Ses trois films suivants (Les nains aussi ont commencé petits, Fata Morgana et Aguirre, la colère de Dieu) sont présentés à la Quinzaine des réalisateurs au festival de Cannes. Il gagne ainsi la reconnaissance internationale en tant que représentant du nouveau cinéma allemand.

En 1979, il réalise Nosferatu, fantôme de la nuit qui est aussi une relecture du personnage mis en scène par Murnau dans son Nosferatu.

En 2010 il préside le jury du 60e Festival de Berlin, composé notamment de la comédienne américaine Renée Zellweger.

Son long métrage La Grotte des rêves perdus, un documentaire sur la grotte Chauvet en Ardèche, est sorti en France le 1er septembre 2011.

Plastiquement, l'œuvre de Werner Herzog est proche du romantisme de Caspar David Friedrich, de l'expressionnisme allemand et du land art.

En 2019 il rejoint l'univers Star Wars en jouant le rôle du Client dans la série The Mandalorian.

Vie privée

En 1967, Werner Herzog se marie avec Martje Grohmann — qui aura un rôle dans Nosferatu, fantôme de la nuit — avec qui il aura un fils, Rudolph Amos Achmed, né en 1973 et lui aussi actif dans le monde du cinéma.

Travail de mise en scène

Thèmes

Un grand nombre des films d'Herzog abordent les thèmes de la folie et de la cruauté de la nature, souvent mêlés (comme dans Aguirre) : il s'agit pour lui de révéler la part sombre de l'homme comme de la nature. Héritier d'un romantisme allemand tardif et sombre, Herzog met en scène une nature, humaine comme terrestre, chaotique, menaçante, presque démoniaque1.

Des tournages difficiles

Dès ses premiers films, Werner Herzog a la réputation d'enchaîner les tournages difficiles, aventureux, voire totalement chaotiques. Cela lui vaut d'être surnommé par certains critiques « le cinéaste de l'impossible ».

Il a, entre autres, rencontré de nombreux problèmes sur les tournages de Aguirre, la colère de Dieu et de Fitzcarraldo, que ce soit dans son rapport avec les comédiens, ou à cause des colères spectaculaires de Klaus Kinski, ou encore à cause d'un environnement hostile (en l'occurrence la forêt amazonienne). Certains comédiens ou figurants ont déclaré qu'il prenait souvent des risques (notamment lorsqu'il tournait au milieu des rapides) ou des décisions irresponsables et dangereuses vis-à-vis de l'équipe de tournage.

Ainsi, pendant le tournage d'Aguirre, certains acteurs et membres de l'équipe ont risqué la noyade lors du tournage de la scène où les radeaux de l'expédition franchissent les rapides. Dans la scène d'introduction on peut voir un canon et des cages tomber le long de la falaise. Ces événements n'étaient pas prévus mais furent finalement gardés au montage final. Herzog, voulant donner au film un style documentaire, gardait souvent ce genre d'incidents au montage. Les relations entre Herzog et Klaus Kinski furent tendues tout le long du tournage. Kinski menaçait régulièrement de mort Herzog. Ce dernier enregistrait systématiquement ses disputes avec Kinski sur bande magnétique. Il avait également acheté une arme pour intimider Kinski quand celui-ci ne voulait pas jouer une de ses scènes.

Pour Fitzcarraldo, Herzog avait commencé le tournage avec Jason Robards et Mick Jagger dans les deux rôles principaux. Malheureusement, Robards perdit la tête lors du tournage car il n'en supportait plus les conditions. Herzog engagea alors Kinski pour le remplacer et fut obligé de tout recommencer. Ayant une tournée qui devait débuter avec les Rolling Stones, Jagger ne put recommencer le tournage. Son rôle fut supprimé. De nouvelles disputes violentes eurent lieu entre Herzog et Kinski. Les Amérindiens figurants du film avaient même offert à Herzog de tuer Kinski « gratuitement » s'il le désirait. Les tensions entre Kinski et les autres membres de l'équipe durèrent tout le long de ce tournage difficile.

La scène où Fitzcarraldo fait hisser le bateau le long de la colline ne comporte aucun trucage, Herzog tenant à ce que cette scène soit d'un réalisme absolu. L'opération fut extrêmement périlleuse pour les figurants et l'équipe technique qui risquaient de se faire écraser à tout instant. Le même bateau subit plusieurs dommages importants lors de la scène des rapides. Il dérivait totalement sans aucun contrôle. Le documentaire Burden of Dreams de Les Blank témoigne de ce tournage aux limites du praticable.

Rapport aux acteurs

À l'image de ses tournages, Werner Herzog aime les personnages et les acteurs excessifs, marginaux, tel Klaus Kinski, hallucinant dans son rôle de mégalomane illuminé d'Aguirre, ou dans celui du vampire Nosferatu auquel il parvient à donner une troublante humanité. Herzog a fait de Kinski son acteur fétiche malgré leurs rapports très particuliers, ce qu'il relate dans son documentaire Ennemis intimes.

Il affectionne aussi l'acteur handicapé Bruno S., qui a passé les trente premières années de sa vie entre les hôpitaux psychiatriques et la prison. L'identification sera parfaite pour le rôle de Kaspar Hauser dans L'Énigme de Kaspar Hauser, où Bruno S. joue un personnage qui a réellement existé, enfermé dans une cave les dix-sept premières années de sa vie, totalement coupé du reste du monde. Il joue aussi dans La Ballade de Bruno.

Dans un autre style, Werner Herzog aurait hypnotisé les acteurs de son mystérieux film Cœur de verre.

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Robert Hamer

Hamer, Robert Réalisateur anglais, 1911-1963

Cet ancien monteur devenu réalisateur par accident (il remplaça Charles Frend, malade, pour le tournage de San Demetrio- London) est l'homme d'un seul film, Noblesse oblige, chef-d'œuvre de l'humour noir anglais où Alec Guiness tenait presque tous les rôles. Pour capter un héritage, un jeune homme désargenté éliminait méthodiquement tous ceux dont les droits le précédaient dans la succession. Le film s' achevait sur une pirouette qui sauvait la morale. Énorme fut le succès de Noblesse oblige, reléguant dans l'ombre les autres réalisations de Hamer dont un film dans la tradition de l'école documentariste anglaise, It Always Rains on Sunday, sur un faubourg londonien, et une adaptation d'une aventure de Father Brown, le détective en soutane de Chesterton.

Filmographie

San Demetrio-London (Le navire en feu, 1943) ; Dead of Night (coréal., Au cœur de la nuit, 1945) ; Pink String and Sealing Wax (1945) ; It Always Rains on Sunday (Il pleut toujours le dimanche, 1947) • Kind Hearts and Coronets (Noblesse oblige, 1949) ; The Spider and the Fly (L'araignée et la mouche, 1950) ; His Excellency (1952) ; The Long Memory (1953) ; Father Brown (Détective du Bon Dieu, 1954) ; To Paris With Love (Deux Anglais à Paris, 1954) ; The Scapegoat (Le bouc émissaire, 1959) ; School for Scoundrels (L'académie des coquins, 1960).

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Ishii Katsuhito

Katsuhito Ishii (石井克人, Ishii Katsuhito), né le 31 décembre 1966 dans la Préfecture de Niigata, est un réalisateur et scénariste japonais


Autant l’annoncer d’entrée, « The taste of tea » est une bombe atomique cinématographique qui propose de l’audace tout azimut relié à un fond très important. Le film est difficile d’accès et il faut rester concentré pour pouvoir suivre. Si vous êtes fatigué, passez votre tour. Mais en pleine possession de ses moyens, cette œuvre d’une très grande originalité offre un spectacle multipiste ahurissant. Le récit propose de relier le plus petit élément à l’universel en se basant sur une famille normale japonaise. Le maître mot de cette oeuvre est le LIEN. Tout est question de lien dans la structure narrative. Chaque élément, chaque personne, malgré leur liberté d’action est relié à un autre élément, une autre personne et surtout à l’universel. Cette narration se rapproche de ce point de vue très précis de films tels que « Georgia » d’Arthur Penn, « 2001 » de Kubrick, « L’homme qui rétrécit » de Jack Arnold ou encore « Eraserhead » de David Lynch. Des chefs-d’oeuvre qui reliaient l’homme à l’universel de façon sublime. Et bien « Taste of tea » n’a pas à rougir de se retrouver dans cette catégorie de monument historique du septième art !!! Dès les premières secondes, on ressent qu’Ishii Katsuhito cherche à en imposer par une audace formelle tout à fait incroyable, se jouant d’une grammaire cinématographique qu’il semble dominer de fond en comble. Inattendu, surprenant, véritable trésor cinématographique, qu’il faut approcher à la fois avec un esprit ouvert et concentré. « The taste of tea » ou quand le quotidien devient sublime et important.

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Abbas Kiarostami

Né le 22 juin 1940 à Téhéran, Abbas Kiarostami ne fut pas, à l'école, un bon élève car il préférait, de beaucoup, dessiner et peindre. À dix-huit ans, il gagne sa vie comme employé, la nuit, à l'administration de la circulation routière. Dans la journée, il étudie la peinture à la Faculté des beaux-arts

Abbas Kiarostami (1940-2016

Il commence à monnayer ses talents de dessinateur en concevant des affiches, des couvertures de livres, puis en travaillant pour une société de production de films publicitaires. Il écrit et réalise, de 1960 à 1969, plus de 150 spots qui sont jugés d'excellente qualité, technique et artistique, mais peu commerciaux. "Ce sont les clips publicitaires et l'art graphique qui m'ont appris le cinéma." reconnaîtra plus tard Kiarostami qui, en 1969, fonde au sein de l'Institut pour le développement intellectuel des enfants et des jeunes adultes (le "Kanun") un département cinéma. Il y tourne d'abord des courts métrages de fiction dont les protagonistes sont des enfants filmés dans leur quotidien, en famille ou à l'école.

Le premier de ces courts métrages, Le pain et la rue (1970), est présenté avec succès aux festivals de Moscou et Venise et attire l'attention de la critique internationale sur son auteur. Durant toutes les années 70 et 80, le monde de l'enfance est le sujet presque exclusif du cinéma de Kiarostami notamment de Expérience (1973), Le passager (1974), ou de Où est la maison de mon ami ? (1987), couronné au Festival de Locarno et de Devoirs du soir (1989) qui donne la parole à des enfants interrogés sur la surabondance de travail scolaire à effectuer à la maison.

Il apparaît alors comme l'héritier de Rossellini, qui filme la réalité telle qu'elle est pour qu'elle se révèle. La vision de Close-up (1990), est toutefois venue bouleverser la donne et Alain Bergala, le plus fin connaisseur du cinéaste iranien, rapproche alors Kiarostami d'Orson Welles, d'un cinéma du faux, de la boucle et de la complication.

Alain Bergala propose de voir en Kiarostami l'héritier de la double culture, occidentale et orientale des perses. L'Islam interdit l'imitation des créatures animées comme le double d'un être vivant mais pas la figuration. Les Perses acceptent un art de l'imitation en accord avec la philosophie platonicienne : le monde que l'on voit n'est que le double d'un monde absolu. Il convient donc de représenter vers l'absolu et non seulement vers ce que l'on croit voir.


Kiarostami reste le cinéaste sensible de la captation des choses mais aussi celui de la géométrie et de l'organisation secrète. Sa spiritualité, aussi prégnante que celle de Rossellini, s'incarne dans des motifs qui lui sont propres.

                                           

 L'arbre en haut d'une colline ou la répétition du motif de l'arbre sont très présents dans les miniatures persanes. Ici : photogrammes de séquences au début et au milieu du film Le vent nous emportera (1999).

Les troncs d'arbre, "le code barre", signe qui empêche la communication. Dans Au travers des oliviers, le garçon interroge la grand-mère puis la fille. Il traite aussi du devenir minuscule des personnages dans l'aplat de couleur dans Le vent nous emportera (1999) un très gros plan de visage est comme racheté par un pur aplat de couleur.

                                          

 Le vent nous emportera (1999).

Mais c'est la Ligne en Z qui reste la marque la plus certaine de sa volonté de spiritualité par géométrisation de l'espace. C'est d'abord une forme secrète, cachée et récurrente

                                      

 Deux autres figures du chemin en Z dans Le vent nous emportera (1999).

Lorsque Le Goût de la cerise (1997) est sélectionné en compétition officielle au festival de Cannes, il est bloqué pour non-respect du code de la censure qui indique très clairement et très longuement tout ce qu'il ne faut pas faire et notamment parler de suicide. Cependant, la veille du palmarès, Téhéran lâche le film. Présenté le soir même, il obtient le lendemain la palme d'or. A Cannes, Kiarostami embrasse la présidente du jury et, lorsqu'il arrive à Téhéran, où aucun journaliste n'a dit qu'il avait obtenu la palme d'or, ils sont 50 personnes à lui jeter des pierres. Les jets de pierre continueront longtemps dans son jardin...

Pour le millénaire qui commençait, Ten, avec ses 2 mini DV fixées dans l'habitacle d'une voiture en mouvement, provoqua une petite révolution esthétique. Par ailleurs, la place que le film accordait aux femmes accentuait encore la portée politique du cinéma de Kiarostami. La vidéo numérique devenait plus que jamais un instrument politique :

"Nous voyons ces jeunes qui s'emparent de leur téléphone portable et gardent des traces des événements actuels, qui deviennent des documents, des preuves" confirme le cinéaste. Mais le réalisateur tient à préciser : "Selon moi, la définition d'un film politique dépend du contexte, de la société en question. Dans un pays comme le nôtre, un film politique est un film qui instruit. Il fournit un terreau nécessaire à une compréhension plus profonde, à une prise de conscience du peuple. C'est cela un film politique, un film pérenne. Autrement, il s'agit de films partisans, de films de propagande. Je ne peux nier l'existence ou la fonction de ces films mais moi, je suis incapable de les faire. Je suis quelqu'un qui ne sait pas crier."

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David Lean

David Lean (Croydon, Londres, 25 mars 1908 – Londres, 16 avril 1991) est un réalisateur, producteur, scénariste et monteur britannique.

 

Il est reconnu pour avoir réalisé des œuvres majeures qui font partie des « classiques » du cinéma, dont Oliver Twist, Le Pont de la rivière Kwaï, Lawrence d'Arabie, Le Docteur Jivago et La Route des Indes. En 2002, le magazine Sight and Sound publié par le British Film Institute l'a placé neuvième dans sa liste des plus grands réalisateurs de l'histoire du cinéma.

Jeunesse

David Lean naît en 1908 à Croydon du mariage de Francis William le Blount Lean et Helena Tangye (nièce de Sir Richard Trevithick Tangye), tous deux quakers. Il fréquente la Leighton Park School, à Reading (dans le Berkshire). Son frère, Edward Tangye Lean (1911–1974), est le fondateur du cercle littéraire des Inklings d'Oxford, dont les membres les plus connus sont C. S. Lewis, J. R. R. Tolkien et Charles Williams. David Lean quitte l'école à l'adolescence et intègre l'entreprise de comptabilité de son père comme apprenti.

Débuts

Mais Lean préfère passer toutes ses matinées au cinéma. Il gardera cependant de son origine modeste une défiance vis-à-vis de la culture élitiste, mêlée d'une indéniable admiration pour les grandes figures romanesques et historiques. En 1927, écoutant une tante qui lui conseille de faire un métier qu'il apprécie, il travaille pendant un mois pour les Studios Gaumont sans recevoir de salaire. Bien qu'on ne lui demande que de faire le thé, il s'enthousiasme pour ce nouveau milieu et est bientôt promu clapman, puis troisième assistant-réalisateur. En 1930, il participe au montage des films d'actualité diffusés au cinéma pour Gaumont et Movietone. En 1935, il occupe le poste de monteur sur le film Escape Me Never de Paul Czinner. Derrière le banc de montage jusqu'en 1942 sur des films comme Pygmalion4 (1938) d'Anthony Asquith et Leslie Howard et 49e Parallèle (1941) de Michael Powell, Lean y acquiert non seulement une solide réputation, mais aussi une expérience et un sens du rythme qui influenceront plus tard ses propres réalisations. Le critique Tony Sloman écrira à ce propos en 1999 que "comme l'ont prouvé David Lean, Robert Wise, Terence Fisher et Dorothy Arzner, le banc de montage est la plus belle formation à la réalisation".

Premières réalisations

David Lean signe son premier film en 1942, Ceux qui servent en mer, en collaboration avec son scénariste Noël Coward dont il adapte par la suite trois pièces : Heureux Mortels en 1944, L'Esprit s'amuse et Brève Rencontre l'année suivante. Ce dernier film est perçu à l'étranger comme un signe de renouvellement du cinéma britannique d'après-guerre et contribue à faire connaître son réalisateur. Lean décide ensuite de porter à l'écran l'Angleterre de Charles Dickens et adapte coup sur coup Les Grandes Espérances (1946) et Oliver Twist (1948). Le Mur du son (The Sound Barrier, 1952) est un drame aéronautique, tandis que Chaussure à son pied (Hobson's Choice, 1954), dont Lean est aussi producteur, est une adaptation comique du Roi Lear dans le Manchester victorien.

Consécration

Avec l'arrivée de la couleur, Lean devient une figure incontournable de l'industrie hollywoodienne pour laquelle il travaille dès 1955, y assurant la réalisation de triomphes commerciaux. Il se spécialise dans le grand spectacle et la fresque historique avec Le Pont de la rivière Kwaï (The Bridge on the River Kwai, 1957) et, son chef-d'œuvre, Lawrence d'Arabie qui lui valent chacun un Oscar pour sa mise en scène. En 1965, il réalise Le Docteur Jivago (Doctor Zhivago) qui est également un succès.

Après le succès mitigé de La Fille de Ryan (Ryan's Daughter, 1970), il ne dirige plus aucun film, très marqué par les critiques négatives de la presse. En retrait, il tente malgré tout de monter divers projets de films, finalement développés par d'autres cinéastes : Gandhi (Richard Attenborough, 1982), Le Bounty (Roger Donaldson, 1984) ou encore Out of Africa (Sydney Pollack, 1985). Il fait finalement son retour en 1984, 14 ans après La Fille de Ryan, avec La Route des Indes (A Passage to India), adapté d'E. M. Forster. Pour ses films épiques, à l'exception du Pont sur la rivière Kwaï, Lean travaille avec le compositeur français Maurice Jarre, dont la musique à la fois électronique et symphonique contribue fortement à la célébrité des films du cinéaste. Aussi en 1984, Lean était anobli avec le titre de Knight Bachelor.

Il meurt en 1991 alors qu'il prépare l'adaptation de Nostromo de Joseph Conrad.

Les films de David Lean

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Claude Lelouch

Né en 1937


 

Abandonnant ses études, Claude Lelouch part effectuer des reportages dans le monde entier (Quand le rideau se lève, filmé illégalement en URSS en 1957). Après avoir tourné plusieurs courts-métrages dans le cadre du Service Cinématographique des Armées, il fonde en 1960 sa propre maison de production, Les Films 13, et réalise son premier long métrage de fiction, Le Propre de l'homme, cuisant échec financier et critique. Si ses essais suivants ne sont guère remarqués (La Femme spectacle est même censuré en 1964), il obtient un succès d'estime avec Une fille et des fusils, inspiré des thrillers américains.

Mais c'est avec Un homme et une femme, dans lequel Jean-Louis Trintignant et Anouk Aimée vivent une passion amoureuse sur la plage de Deauville, que Claude Lelouch connaît brusquement la gloire en 1966. Palme d'Or au Festival de Cannes et couronné par deux Oscars, le film -qui donnera lieu à une suite 20 ans plus tard- étonne par son style pris sur le vif, dû à la spontanéité des comédiens (qui ne connaissent leurs répliques qu'au dernier moment) et à la virtuosité d'un filmage en caméra légère. Cette méthode deviendra la marque de fabrique d'un cinéaste qui se frottera à différents genres, de la comédie sociale (Smic, Smac, Smoc) à la fresque historique (Toute une vie) en passant par le polar (Le Voyou en 1970). Adoptant le plus souvent un ton léger (L' Aventure c'est l'aventure et sa bande de Pieds Nickelés), il reste fidèle à la thématique des Hasards ou coincidences, titre d'un film de 1998.

Amoureux des acteurs, Claude Lelouch fait tourner les stars du cinéma français- Deneuve, Montand ou encore Belmondo dans Itinéraire d'un enfant gâté- mais fait aussi régulièrement appel à des comédiens non-professionnels, de Bernard Tapie à Patricia Kaas. A l'intérieur de castings souvent pléthoriques, on note la présence de fidèles tels que Villeret (qu'il révèle dans Le Bon et les méchants en 1976), Huster et Charles Gérard. Brouillant les frontières entre réalité et fiction, le cinéaste filme volontiers les femmes de sa vie -Evelyne Bouix, Marie-Sophie L. et Alessandra Martines - dans des films-fleuves qui font s'entrecroiser les époques (Les Uns et les Autres, un de ses plus gros succès) et les intrigues sentimentales (Il y a des jours... et des lunes, Tout ça... pour ça !).

Se lançant régulièrement des paris fous, Claude Lelouch retrace la passion entre Piaf et Cerdan dans Edith et Marcel (1983), conte une histoire d'amour qui court sur 2000 ans dans La Belle histoire (1992) et transpose le chef d'oeuvre de Victor Hugo à l'époque contemporaine dans Les Misérables en 1994. Si ses audacieuses entreprises ne rencontrent pas toujours le public, il obtient au fil du temps la reconnaissance d'une partie de la critique. Réalisateur, scénariste, producteur, et parfois distributeur, Claude Lelouch se lance en 2004 un nouveau défi en échafaudant une trilogie intitulée Le Genre humain. Mais après le cuisant échec du premier volet, il doit renoncer à ce projet. Meurtri, il tourne incognito son film suivant, Roman de gare, présenté en Séance spéciale à Cannes en 2007 avant de retrouver son actrice principale Audrey Dana, trois ans plus tard pour Ces amours-là, une fresque sentimentale emblématique de son œuvre, à laquelle il pense depuis 40 ans.

En 2011, il fait le bilan de sa carrière au travers d'un documentaire nommé D'un film à l'autre, dans lequel il dresse un autoportrait composé d'extraits de films, d'interviews et de making-of. En 2014, il revient derrière la caméra pour tourner le long-métrage Salaud, on t'aime, avec Johnny Hallyday et Eddy Mitchell.

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Albert Lewin

Albert Lewin est un scénariste, réalisateur et producteur américain, né le 23 septembre 1894 à Brooklyn (New York) et mort le 9 mai 1968 (à 73 ans) à New York.

Né à New York, Albert Lewin grandit à Newark (New Jersey). Il obtient une maîtrise à Harvard et enseigne l'anglais à l'Université du Missouri-Columbia. Durant la première guerre mondiale, il sert dans l'armée, et par la suite, il est nommé directeur national adjoint de l'American Jewish Relief Committee. Plus tard, il devient critique de théâtre et de film pour le Jewish Tribune jusqu'au début des années 1920, époque à laquelle il va à Hollywood pour devenir lecteur de Samuel Goldwyn. Il travaille ensuite comme script-assistant pour les réalisateurs King Vidor et Victor Sjöström, avant de devenir scénariste à la Metro-Goldwyn-Mayer en 1924.

Nommé responsable du département scénario du studio, il devient à la fin des années 1920 assistant personnel d'Irving Thalberg et un de ses plus proches associés. Il est crédité comme producteur associé sur de nombreux films durant les années 1930. Après la mort d'Irving Thalberg, il rejoint la Paramount en 1937. Il y travaille comme producteur jusqu'en 1941. Durant cette période, il produit notamment La Folle Confession (True Confession) (1937), Les Gars du large (Spawn of the North) (1938), Zaza (1939) et So Ends Our Night (1941).

En 1942, il se lance dans la réalisation. Il réalise et scénarise six films. En tant que réalisateur et scénariste, il montre de grandes aspirations culturelles et littéraires dans le choix et le traitement de ses thèmes. Il est connu pour avoir organisé un concours de peinture sur le thème de la tentation de saint Antoine. Le tableau du gagnant devait figurer dans son film The Private Affairs of Bel Ami. Salvador Dalí, Max Ernst, entre autres, participèrent au concours.

En 1966, il publie un roman, The Unaltered Cat.

Albert Lewin est mort d'une pneumonie à New York le 9 mai 1968.

PANDORA

                                                            

Critiques de spectateur vues sur le site d ‘ALLOCINÉ

Un ovni de la production cinématographique, rêve d'esthète raffiné (le nabab américain Albert Lewin, ami des surréalistes) qui fait œuvre d'avant-garde sur la base d'un récit des plus classiques (éblouissante modernisation de la légende de Hollandais volant)! Alliant l'amour fou, les vieilles légendes, l’immortalité et la fantastique en passant par les voitures de courses et les corridas, Lewin nous entraîne dans un univers irréel où le temps n'existe plus! Illuminé par la présence d'Ava Gardner au sommet de sa beauté, "Pandora" jouit encore aujourd'hui d'un prestige durable auprès des cinéphiles! Au delà des spéculations les plus folles, Ava était un mythe: femme de rêve, mais aussi de chair et de sang, pour qui les hommes mourraient, mais qui meurt à son tour pour un homme! Lewin, un des rares vrais intellectuels Hollywood, rendait crédible ce qu'aucune autre actrice n'aurait pu faire vivre! il faut souligner également les superbes cadrages et le soin apporté aux couleurs somptueusement photographié par Jack Cardiff! Dans une Espagne réaliste et folklorique, Lewin réalise une œuvre mythique au romantisme fantastique...


Il est difficile d'écrire la critique d'un film lorsque celui-ci est véritablement hors du commun. "Pandora" en est un, c'est exactement le genre d’œuvre qui ne ressemble à aucune autre, que l'on voit apparaître que tous les demi-siècles. Donc je n'écrirais que des banalités sur un film qui est pourtant loin de l'être. D'abord, Albert Lewin adapte à merveille la mythologie du Hollandais volant pour en faire une histoire d'amour déchirante. Sa mise en scène est baroque et poétique, on ne compte même plus les grands moments qui ponctuent le film. Le tout est accentué bien sûr par la photographie flamboyante de Jack Cardiff qui capte aussi bien la luminosité des extérieurs en Espagne que celles des intérieurs de studios. Mais que serait ce film sans son couple vedette ? Ava Gardner, dont c'est le plus beau rôle, et James Mason sont bouleversants et contribue à faire de "Pandora" le triomphe de l'amour fou au cinéma.

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Philippe Lioret

Philippe Lioret est un réalisateur, scénariste et producteur français né le 10 octobre 1955 à Paris.

C'est dans le domaine du son, filière atypique pour un futur réalisateur, que Philippe Lioret commence son parcours professionnel. Il apparaît ainsi au générique d'une vingtaine de films de 1980 à 1992, comme assistant, puis ingénieur du son pour des réalisateurs aussi variés que Michael Apted, Coline Serreau, Michel Drach, Claude Goretta, Robert Altman et Michel Deville avec qui il collabore sur plusieurs films et avec lequel il tisse des liens très proches.

En 1993, il passe à la réalisation en écrivant et dirigeant Tombés du ciel, avec Jean Rochefort, Ticky Holgado et Marisa Paredes, pour lequel il obtient le Prix de la mise en scène et celui du scénario au Festival de Saint-Sébastien.

Attaché à des acteurs fétiches, comme Jacques Gamblin, Sandrine Bonnaire puis Vincent Lindon, il choisit d'abord ses sujets en privilégiant la légèreté dans les thèmes profonds, comme dans Tenue correcte exigée (1997) et Mademoiselle (2000). En 2003, il tourne L'Équipier pour lequel il aura trois nominations aux César. En 2006, nouveau succès avec Je vais bien, ne t'en fais pas, qui décroche 5 candidatures aux Césars dont meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario, et en obtient deux : meilleur espoir féminin pour Mélanie Laurent et meilleur acteur pour Kad Merad.

En 2009, il réalise Welcome, film engagé et sensible sur le thème des migrants, qui touche l'opinion et devient un succès public. Il obtient 10 nominations aux César dont meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur acteur. Sa comparaison du sort des immigrés clandestins avec celle des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale est néanmoins sévèrement critiquée par des historiens comme Henry Rousso qui y voit de l'« ignorance » et de la « provocation », mais qui affirme aussi que : « Le propos du film de Philippe Lioret a néanmoins le mérite d’attirer l’attention sur un point: un pays comme la France, qui a connu des poussées de xénophobie et a participé au génocide des Juifs, devrait être averti et vigilant sur ces pratiques discriminatoires envers des enfants et des adultes sans protection. »

En 2010, il se mobilise pour la cause des travailleurs étrangers en situation irrégulière en grève aux côtés de nombreux cinéastes et artistes.

En novembre 2011 sort Toutes nos envies, librement inspiré du livre D'autres vies que la mienne d'Emmanuel Carrère, avec à nouveau Vincent Lindon, et Marie Gillain, nommée aux Césars pour ce film.

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Ernst Lubitsch

1892 - 1947

I - Mise en scène

Plus que l'immense auteur qu'il est, Ernst Lubitsch est l'inventeur de la fameuse "Lubitsch's touch". Son nom est associé à la comédie sophistiquée, au champagne et au... gruyère, grâce à l'un de ses fervents admirateurs, François Truffaut, qui déclarait que "dans le gruyère Lubitsch, chaque trou est génial ", rendant ainsi hommage à son sens de l'ellipse, la marque de son style, disait-il, qui fait du spectateur un personnage à part entière.

L'ellipse que François Truffaut relevait dans œuvre de Lubitsch n'est toutefois que le moyen subtil et privilégié pour provoquer l'émotion qui est déclenchée par un signe particulier que Gilles Deleuze dénomme indice, attaché à l'image-situation.

Gilles Deleuze fait en effet de Lubitsch le grand maître, avec Charles Chaplin, de l'image-situation. Celle-ci s'oppose à la loi globale ou intégrale de l'image-action. Cette dernière compose, dans les films épiques notamment, un grand écart entre une situation délicate et une situation idéale qui n'existe que pour être comblé par le héros. Dans l'image-situation, Lubitsch va au contraire créer des petites différences qui n'existent que pour être creusées, pour susciter des situations très différentes ou opposables.

indices de manque et d'équivocité

L'image-situation va ainsi d'une action, d'un comportement à une situation partiellement dévoilée. Le signe par lequel on la reconnaît est l'indice : une action, ou un équivalent d'action, un geste simple, qui dévoilent une situation qui n'était pas donnée.

La situation est conclue de l'action par inférence ou par un raisonnement relativement complexe. L'indice est souvent d'autant plus fort qu'il enveloppe un raisonnement rapide.

Par exemple, dans Sérénade à trois, l'un des deux amants, George (Gary Cooper) voit l'autre vêtu d'un smoking, au petit matin chez l'aimée commune : il conclut de cet indice (et le spectateur en même temps) que son ami a passé la nuit avec la jeune femme. L'indice consiste donc en ceci que Tom (Frederic March) est "trop" habillé pour être venu rendre visite le matin seulement à Gilda. Tom a repris le smoking qu'il a abandonné à la fin de la soirée et a donc été durant la nuit dans une situation très intime qui n'a pas été montrée.

Le costume au petit matin est un indice de manque. C'est une image-raisonnement. Dans ce cas l'indice résulte d'une ellipse, d'un trou dans le récit, mais il se peut aussi que l'indice de manque soit celui d'un vide dans l'espace, d'un hors-champ.

Lorsque dans Illusions perdues, Jill se rend chez Alexander, le panoramique qui saisit la bouteille puis le sac sur le canapé alors que s'élève, off, une musique qui se révèle être Alexander jouant au piano, signifie que les discussions d'usage ont déjà eut lieu. Jill écoute et regarde Alexander qui veut prendre un baiser. Elle se refuse. Elle sort du champ. Il sort du champ. Le cadre reste vide durant une dizaine de secondes. Il revient et se met à jouer du piano dans tous les sens. Ce cadre resté vide une dizaine de secondes puis qui se remplit avec Alexander jouant joyeusement est le signe, que, hors-champ, le baiser à eut lieu.

Il y a un second type d'indice, l'indice d'équivocité que Lubitsch met en scène par décalage vis à vis d'une situation stéréotypée. C'est comme si une action, un comportement recelait une petite différence qui suffit pourtant à la renvoyer simultanément à deux situations tout à fait distantes et éloignées.

Dans Les films de ma vie, François Truffaut relevait le jeu avec le cendrier en forme de gondole qui titille le subconscient du comptable de madame Collet dans Haute pègre. Il finira par lui rappeler qu'il s'est fait berner par Gaston à Venise. Il s'agit là d'un des plus beaux indices d'équivocité mis en scène par Lubitsch : simple cendrier pour partager les discussions mondaines ou objet révélateur de la personnalité réelle de Gaston.

La scène dans la chambre à coucher de Jill et Larry dans Illusions perdues débute par le chien en gros plan qui lève la tête de son panier. Jill entre, regarde son mari dormir, vient se coucher à côté de lui après avoir caressé le chien et fait "ouah" pour le réveiller. Larry, dans un demi-sommeil, se lève et porte le chien dehors. Dépitée, Jill lui dit que c'est elle qui a aboyé. Mais on entend alors le chien aboyer dehors et Larry se retourne vers sa femme en lui intimant l'ordre de se taire par un "chut". L'indice du chien est que Larry est devenu tellement indiffèrent à sa femme qu'il la confond avec son chien. Ce n'est pas une image rassurante du bonheur conjugal mais au contraire l'indice que plus rien ne va dans le couple.

Dans To be or not to be, on se demande, quand l'aviateur quitte son siège dès que l'acteur commence son monologue, si c'est parce qu'il en a assez ou parce qu'il a rendez-vous avec la femme de l'acteur ? Une très petite différence dans le geste mais aussi l'énormité de la distance entre deux situations telles qu'une question de vie ou de mort.

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Joseph L. Mankiewicz

Joseph Leo Mankiewicz , né le 11 février 1909 à Wilkes-Barre en Pennsylvanie et mort le 5 février 1993 à Mount Kisco (New York)

Réalisateur, scénariste et producteur de cinéma américain.

Il est le frère d'Herman J. Mankiewicz, scénariste de films majeurs comme Citizen Kane d’Orson Welles.

Joseph Leo Mankiewicz est le fils cadet de Franz Mankiewicz et Johanna Blumenau, immigrés juifs venus d'Allemagne. Après ses études secondaires à la Stuyvesant High School, il s'inscrit à l’université Columbia où il obtiendra son Bachelor of Arts en 1928. Puis, sur les conseils de son père, il part à Berlin pour parfaire son éducation. À Berlin il est correspondant du Chicago Tribune, parallèlement, il s’intéresse au théâtre et au cinéma et est embauché par l’UFA pour traduire les intertitres des films destinés au marché anglo-saxon. À la suite de l'émission d’un chèque sans provision, il quitte précipitamment Berlin pour Paris. En 1929, son frère Hermanqui travaille comme scénariste (Marx Brothers, Citizen Kane, etc.) à la Paramount Pictures lui suggère de rentrer le rejoindre. Joseph se voit chargé de la rédaction de sous-titres puis de scénarios pour des comédies simples (Skippy, 1931, nommé aux Oscars pour son scénario) et burlesques (pour W. C. Fields).

Passant à la MGM il obtient une nouvelle nomination aux Oscars du scénario pour L’Ennemi public no 1 tourné par W.S. Van Dyke. Alors qu’il exprime le souhait de tourner lui-même ses scénarios, Louis B. Mayer le nomme producteur — il produisit entre autres Furie de Fritz Lang, qui ne lui pardonna pas d’avoir procédé à des coupes, contre son avis, sur la fin du film.

En 1942, il se brouille avec L. B. Mayer et rejoint la 20th Century Fox. C’est à ce moment que Lubitsch, victime d’une crise cardiaque et incapable de tourner, lui confie la tâche de réaliser un film qu’il devait faire : Le Château du dragon (1946).

Mankiewicz rencontre ensuite le succès avec Chaînes conjugales (1949), qui remporte les Oscars du scénario et de mise en scène. L’année suivante il réitère la performance, obtenant exactement les mêmes prix pour Ève, qui remporte également l’Oscar du meilleur film.

En 1950 alors qu’il est président de la Screen Director Guild, Cecil B. DeMille profite d’une période où Mankiewicz est absent pour tenter une offensive pro-maccarthysme. À son retour, Mankiewicz s’oppose à la manœuvre et, soutenu par John Ford, repousse l’attaque.

En 1951, après avoir tourné L’Affaire Cicéron, il quitte la Fox et Los Angeles pour aller s’installer au calme sur la côte Est.

En 1952, il adapte le Jules César de William Shakespeare pour la MGM et met en scène La Bohème de Giacomo Puccini pour le Metropolitan Opera.

En 1953, il crée sa propre maison de production, Figaro Inc., qui produisit l’année suivante La Comtesse aux pieds nus. Les films suivants rencontrent moins de succès. Il faut attendre 1959 pour que Soudain l’été dernier le ramène à l’avant-scène.

En 1960, il est appelé en urgence pour sauver le tournage de Cléopâtre. Très réticent, il accepte en échange d’une grosse somme d’argent et du sauvetage de Figaro Inc. du naufrage financier. Cléopâtre l’accapare jusqu’en 1963. Son montage fut remanié par Zanuck et Mankiewicz renia le film.

En 1967 sort Guêpier pour trois abeilles et en 1970, un western, Le Reptile.

En 1972, il tourne son dernier film, Le Limier.

Il se retire ensuite, se consacrant à la lecture et se tenant en retrait de l’industrie cinématographique.

Il décède des suites d'un infarctus le 5 février 1993 à 6 jours de son 84e anniversaire au Northern Westchester Hospital de Mount Kisco dans l’État de New York.

Il est enterré au cimetière Saint Matthew's Episcopal Churchyard de Bedford (comté de Westchester dans l’État de New York).

Joseph Mankiewicz s'est marié trois fois :

  1. Elizabeth Young (1934-1937)

  2. L'actrice Rose Stradner (1913-1958).

  3. Rosemary Matthews (1962-1962)

Il obtient son étoile sur le Hollywood Walk of Fame le 8 février 1960.

Les archives de Joseph Mankiewicz sont déposées à la Bibliothèque Margaret Herrick Library de l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences.

Commentaires

Réalisateur atypique du panthéon américain, ses films se caractérisent par une quasi absence d’action, au sens hollywoodien du terme, et l’importance prépondérante des flashbacks, des dialogues et des rapports entre les personnages. Ses têtes d’affiches couvrent le gotha de l’époque (Marlon Brando, Elizabeth Taylor, Bette Davis, Ava Gardner, Humphrey Bogart, Montgomery Clift, Gene Tierney, Vincent Price…) avec une prépondérance d’acteurs britanniques : George Sanders, Rex Harrison, Cary Grant, Richard Burton, Laurence Olivier, Michael Caine, James Mason, Maggie Smith…

Sa filmographie est relativement restreinte comparée à celle des autres grands noms du cinéma américain, mais peu de ses films sont passés inaperçus. Mankiewicz s’est même essayé au péplum (Cléopâtre qui fut jusqu'en 1995 le film le plus cher jamais réalisé, à la comédie musicale (Blanches colombes et vilains messieurs) et au western (Le Reptile).

ITV de Joseph Leo Mankiewicz

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Jacques Feyder

Jacques Frédérix dit Jacques Feyder, est un réalisateur, scénariste, acteur, producteur de cinéma et monteur d'origine belge,

naturalisé français, né le 21 juillet 1885 à Ixelles (Belgique), mort le 24 mai 1948 (à 62 ans) à Prangins (Suisse).

 

 

Jacques Feyder est le petit-fils de Gustave Frédérix, célèbre critique théâtral belge. Il débute au théâtre en 1908, et il est figurant dans plusieurs films avant de devenir l'assistant de Gaston Ravel de 1912 à 1915. Il réalise ensuite des courts-métrages, et sa rencontre avec Tristan Bernard lui permet d'adapter certaines de ses comédies. Il tourne en Afrique son premier grand film, L'Atlantide en 1921, dans des décors naturels, pendant huit mois. Cette œuvre révèle sa maîtrise de la peinture des grands espaces, maîtrise que l'on retrouve dans un autre chef-d'œuvre, Visages d'enfants (tourné en 1923, sorti en 1925), tourné en grande partie en décors naturels dans le Haut-Valais. La critique de l'époque a bien souligné l'authenticité du cadre. Pour L'Atlantide, déjà, Feyder avait refusé de tourner ses extérieurs en France où les paysages désertiques de Fontainebleau auraient pu faire l'affaire. Il a tenu à partir pour le Sahara, sur les lieux mêmes décrits par Pierre Benoit pour tourner ses extérieurs. Pour Visages d'enfants, Feyder emmène sa troupe dans le Haut-Valais, où sont tournés tous les extérieurs pendant le printemps et l'été de 1923. D'authentiques paysans, dont beaucoup n'ont jamais vu une caméra, ni même assisté à une projection de film, composent la figuration. Ces scènes sont tournées dans le village de Grimentz, où Feyder et Françoise Rosay reviendront près de vingt ans plus tard pour la réalisation d'Une femme disparaît. Seuls les intérieurs du chalet et la chapelle, enterrés sous l'avalanche, tout comme certains raccords, sont tournés en studio à Paris.

Henry Roussell et Albert Préjean (à droite) dans Les Nouveaux Messieurs (1929).

 

Si l'exemple des films suédois a été bien compris par Feyder lors du tournage de Visages d'enfants, l'influence de Gance et même de D. W. Griffith est tout aussi sensible, notamment avec le montage accéléré de La Roue que Feyder utilise dans Visages d'enfants pour traduire le désarroi du jeune orphelin à l'enterrement de sa mère.

Visages d'enfants, production coûteuse, assoit la réputation de Jacques Feyder comme cinéaste prodigue. Le triomphe de L'Atlantide n'a pas effacé dans l'esprit des producteurs les exigences du réalisateur qui ont fait de ce film le plus coûteux de la production française. Le tournage en extérieurs a fortement augmenté le budget : prévu pour deux mois, le tournage dans le Haut Valais s'étire sur quatre. Des déboires d'ordres financiers mettent en péril le destin commercial du film. Soucieux d'assurer une meilleure diffusion à leurs films – à l'instar des Artistes Associés –, Feyder et ses confrères Max Linder et René Hervil avaient créé un consortium, les Grands Films Indépendants. Mais un désaccord survient entre Feyder et l'administrateur à la suite duquel les bobines impressionnées de Visages d'enfants sont mises sous séquestre.

Feyder doit attendre un an – pendant lequel il tourne l'Image à Vienne pour la Vita-Film – avant d'achever son montage. Présenté en janvier 1925 Visages d'enfants sort enfin en mars de la même année, salué comme un film charnière par la critique et boudé aussitôt par le public. Jean Mitry, historien et théoricien français du cinéma, écrit cependant : « S'il me fallait retenir un seul film de toute la production française des années 1920, c'est assurément Visage d'enfants que je retiendrais. »

Suite au succès de L'Atlantide, il projette d'adapter un autre roman de Pierre Benoit : Le Roi lépreux. Pour cela, en 1927, il se rend au Cambodge. Le projet n'aboutira pas, mais il ramènera le court-métrage Au pays du roi lépreux (1927).

En 1928, Feyder part pour Hollywood où il est sous contrat avec la MGM jusqu'en 1933. Il réalise entre autres deux films avec la star Ramon Novarro, Daybreak et Le Fils du radjah, où l'on reconnaît sa recherche de lumière et son sens de la poésie.

Le Prix international de la mise en scène lui est décerné en 1936 à la Mostra de Venise pour La Kermesse héroïque.

Il est naturalisé français en 1928. Il met le pied à l'étrier à Marcel Carné en le choisissant comme assistant dans Le Grand Jeu, Pension Mimosas et La Kermesse héroïque.

Il épouse l'actrice Françoise Rosay, qu'il fait tourner dans ses principaux films : La Kermesse héroïque, Le Grand Jeu. Deux de leurs enfants sont réalisateurs, Paul Feyder et Bernard Farrel. Le troisième, Marc Fréderix, est décorateur.

Jacques Feyder a habité au 195 rue de l'Université (Paris).

Un lycée porte aujourd'hui le nom de Jacques-Feyder à Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis).

Il est inhumé au Cimetière de Bruxelles à Evere.

LA KERMESSE HÉROÏQUE

Analyse

Ce film ouvre, avec les deux longs métrages précédents de Feyder (Le Grand Jeu et Pension Mimosas), la veine du réalisme poétique qui sera ensuite approfondie par son assistant Marcel Carné.

C'est aussi un hommage à l'âge d'or de la peinture flamande, qui a inspiré les décors et la mise en scène. L'œuvre de Feyder rend compte du réalisme de cette peinture et met en exergue des personnages truculents, qui semblent tout droit sortis de ces tableaux. Les plans fixes sont nombreux, de façon à privilégier le point de vue que l'on peut avoir devant une peinture. La taille des décors est réduite, afin de laisser une place prédominante aux personnages, comme cela se faisait dans les tableaux flamands. Feyder, d'origine belge, voyait dans ce film « le plus grand effort qui a été réalisé pour vulgariser et diffuser à travers le monde, l'art prestigieux des grands peintres de son pays natal. ».

La ville de Boom a été reconstituée, par le décorateur Lazare Meerson, dans la cour des studios d'Épinay-sur-Seine en France2. Il a su reproduire, dans un style poétique, l'ambiance de la ville et des intérieurs flamands du XVIIe siècle. Son travail, avec l'aide d'Alexandre Trauner et Georges Wakhévitch, a fortement contribué à la beauté du film3.

Une réception tendue

La Kermesse héroïque obtint, à sa sortie en Europe, un très grand succès dans les salles. Mais le film suscita aussi des réactions de rejet en Flandre où on lui reprocha de présenter les Flamands comme des lâches et des collaborateurs. Lors de la première guerre mondiale, une grande partie de la Flandre était occupée par les Allemands. L'histoire pouvait dès lors peut-être évoquer indirectement un faible esprit de résistance des habitants pendant cette période et même de la complaisance envers l'occupant. C'est ainsi qu'il fut compris par des spectateurs de 1936, ce qui suscita des manifestations de protestation dans les grandes villes du nord de la Belgique. Georges Sadoul, historien du cinéma, se porta en faux contre cette interprétation : « Ce qui était sans rapport avec les intentions du réalisateur. Elles relevaient d'un pacifisme ancien, sans pour cela annoncer la "collaboration" dans laquelle, cinq ans plus tard, devaient se lancer les flamingants adversaires de La Kermesse ». Le film fit débat à la chambre belge qui repoussa la demande d'interdiction demandée par certains Flamands. La Kermesse fut cependant interdite à Bruges. Le dr Goebbels, ministre allemand de la propagande, favorisa le film à sa sortie car il donnait, selon lui, une bonne image de l'occupation allemande en 1914-1918. Il le fit interdire plus tard en Europe occupée tout le temps de la guerre.

Récompenses

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Georges Franju

(1912-1987)

La contribution de Georges Franju au renouveau du cinéma français dans les années cinquante, quoique discrète et toujours située en marge des vagues, anciennes ou nouvelles, et des écoles, voire à contre-courant de celles-ci, est exemplaire. Dans le documentaire, tout d'abord : Le Sang des bêtes (1948), Hôtel des Invalides (1951), Monsieur et madame Curie (1953), Notre-Dame, cathédrale de Paris (1957) sont des réussites rares, dans des genres ingrats par excellence (les visites de musée, l'hagiographie). Réussites dans la voie du lyrisme, du non-conformisme, de l'humour, un humour volontiers corrosif, démystifiant : Franju ne mâche pas ses mots... ni ses images.

Ses films de long métrage, à partir de 1958, conservent ces qualités intactes, par delà quelques maladresses lorsque le scénario ou les interprètes lui échappent. Deux Franju semblent alors se dessiner : celui des transpositions à l'écran d'œuvres littéraires parvient à s'exprimer en « trahissant » subtilement la lettre, mais non l'esprit, des auteurs qu'il adapte, qu'il s'agisse d'Hervé Bazin (La Tête contre les murs, 1959), de Mauriac (Thérèse Desqueyroux, 1962), de Cocteau (Thomas l'imposteur, 1964) ou de Zola (La Faute de l'abbé Mouret, 1970). L'épanouissement est plus net lorsqu'une substance romanesque moins riche permet le déferlement de ses fantasmes : c'est alors le Franju, véritablement inspiré, des Yeux sans visage (1960), de Judex (1964) ou de la série télévisée L'Homme sans visage (1973)ou encore des Nuits rouges (1973).

Georges Franju avait fondé en 1936, avec Henri Langlois et Jean Mitry, la Cinémathèque française. De 1945 à 1953, il fut également secrétaire général de l'Institut de cinématographie scientifique fondé et dirigé par Jean Painlevé. Ses admirations vont à Méliès, à Feuillade, à Fritz Lang (et aussi à Eluard et à Sade). Franju, que l'on traite parfois de violent, d'agressif, est en réalité (comme Buñuel) un généreux et un amoureux des hommes. Il demeure fidèle à quelques idées simples : la haine de la guerre, de l'hypocrisie, de la société répressive, l'amour des animaux et des enfants. Paraphrasant Artaud, on pourrait dire qu'il rêve d'un « cinéma de la cruauté », mais enrobé dans une délicate poésie formelle. La vertu thérapeutique première de son art, écrit Freddy Buache, est de « réinstaller, par ébranlement, une conscience au centre de l'homme ».

Postérité littéraire : "Le sang des bêtes"

L'écrivain Joseph Ponthus y fait référence, alors que lui-même travaille en abattoir : « Le Sang des bêtes est un documentaire réalisé en 1949 par Georges Franju dans les abattoirs de Vaugirard et de La Villette qui fait passer n'importe quelle vidéo de L214 pour un épisode gentillet de La Petite Maison dans la Prairie », et indique « Le Sang des bêtes est insoutenable et c'est pour ça qu'il faut le voir Parce qu'il montre précisément le métier ».

Jonathan Coe l'évoque longuement dans Testament à l'anglaise : « un soir, alors que j'avais vingt-quatre ans, j'allai assister à un festival de films français organisé par le ciné-club de l'université. On projeta d'abord Le Sang des bêtes, court documentaire de Georges Franju sur un abattoir parisien. La salle s'était à moitié vidée avant la fin. C'était un public typique de ciné-club : amateurs endurcis de films d'horreur, pour la plupart (...). Mais qu'y avait-il dans ce film précis, tellement délicat et mélancolique à maints égards, pour faire crier de dégoût les femmes, et pousser les hommes vers la sortie ? ». Le personnage recherche alors avidement une critique du film qui permettrait de porter un coup aux images qui le hantent, mais sans succès. Tout au contraire, ses lectures l'amènent à reconnaître la force du film, et le fait que la société, comme la nature, sont deux folles, « un système de mort autant que de vie ».

Muriel Pic cherche en 2017 à se confronter aux images des anciens abattoirs parisiens de Vanves et de la Villette, en ayant recours aux archives inédites du tournage du film de Franju, à des fragments de récits autobiographiques, et à des réflexions sur le rapport des sociétés à l’abattage de masse..

Interviews de Georges Franju

Début et "La tête contre les murs" - Le sang des bêtes - Hôtel des invalides - Thérèse Desqueyroux - Judex - Thomas l'imposteur - Discours sur l'insolite - Les yeux sans visage

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Stephen Frears

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Né en 1941

Né à Leicester en Angleterre le 20 juin 1941,

Stephen Frears poursuit des études à la Faculté de Cambridge avant de devenir assistant du metteur en scène Lindsay Anderson au Royal Court Theatre de Londres.

En 1966, il pénètre le milieu du cinéma en devenant l'assistant de Karel Reisz pour son film Morgan, avant d'intégrer la société de production d'Albert Finney. Après un court métrage intitulé The Burning en 1967, Stephen Frears réalise son premier long métrage, Gumshoe en 1972, un thriller inspiré des films noirs des années 40, scénarisé par Neville Smith. Parallèlement, il entame une carrière prolifique à la télévision anglaise, avec près de quarante téléfilms dramatiques.

En 1984, le cinéaste revient au grand écran et au thriller à rebondissement avec The Hit, puis reprend son travail à la télévision avec My Beautiful Laundrette (1985), film à petit budget, d'après un livre et sur un scénario d'Hanif Kureishi qui évoque les troubles raciaux entre Anglais et Pakistanais à travers les relations homosexuelles de ses deux héros A la suite des critiques enthousiastes, Channel Four fait gonfler des copies en 35 mm pour les distribuer dans toute l'Europe.

S'ensuivent deux autres films complétant la trilogie autour de la déliquescence de la société britannique : L'académique Prick up your Ears (1987) d'après le livre de John Lahr qui relate la vie du dramaturge Joe Orton, dont la mort révéla à l'Angleterre puritaine son homosexualité et sa vie ponctuée de scandales et Sammy et Rosie s'envoient en l'air qui traite des rapports inter-culturels et des conflits entre générations dans un Londres ravagé par les émeutes. Cette nouvelle adptation d'Hanif Kureishi choque certains membres de la communauté pakistanaise en raison des moeurs sexuelles des protagonistes et de certaines allusions à la religion. le film est néanmoins un succès public et reste de très loin aujourd'hui le meilleur film de Stephen Frears.

En 1988, Frears triomphe avec son adaptation très académique des Liaisons dangereuses de Choderlos De Laclos, premier film à costumes et première production internationale à succès qui sera récompensée aux Oscars et révèlera Michelle Pfeiffer aux côtés de Glenn Close et de John Malkovich. Par la suite, son retour aux sources et au film noir avec Les Arnaqueurs tourné aux Etats-Unis, en feront un moment un cinéaste capable de s'adapter à Hollywood.

Se partageant désormais entre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, il enchaîne avec une comédie grinçante Héros malgré lui en 1992 avant de s'atteler à une petite production en 1993 intitulée The Snapper. Trois ans plus tard, il retrouve le scénariste Christopher Hampton ainsi que John Malkovich et Glenn Close dans Mary Reilly, relecture du mythe du Docteur Jekyll et Mr Hyde mettant également en scène Julia Roberts. Il travaille en même temps son film suivant, The Van, troisième volet de la trilogie "Barrytown" d'après l'auteur irlandais Roddy Doyle après Les Commitments d'Alan Parker (1991) et The Snapper. Enfin en 1998, il reprend le scénario que souhaitait tourner Sam Peckinpah trente ans plus tôt, The Hi-Lo Country, un western nostalgique produit par Martin Scorsese. En 2000, Stephen Frears adapte lourdement le roman High Fidelity de Nick Hornby et produit et coécrit par John Cusack, à l'origine du projet.

De retour en Grande-Bretagne, il tourne l'historique chronique Liam suivi du thriller Dirty pretty things où il dirige Audrey Tautou dans son premier rôle anglophone. Après avoir animé la traditionnelle "Leçon de cinéma" du Festival de Cannes en 2004, le cinéaste se penche sur l'histoire du Windmill Theatre de Londres pendant la Deuxième Guerre mondiale avec Madame Henderson présente. Il revient sur le petit écran avec The Deal, une étude des relations entre le Chancelier Gordon Brown et le Premier ministre Tony Blair, qui lui permet d'obtenir le BAFTA du meilleur film de télévision en 2004. Portant un vif intérêt à la politique anglaise et à la famille royale, il s'attaque en 2006 à The Queen, portrait de la famille royale et de la politique menée par Elizabeth II avec pour toile de fond la mise en lumière des conséquences du tragique décès de la Princesse Diana.

Président du jury du 60ème festival de Cannes en 2007, il a présenté au dernier Festival de Berlin en avant-première mondiale Chéri, adaptation du roman éponyme de Colette. Film d'époque scénarisé par Christopher Hampton, ce dernier lui permet de renouer avec Michelle Pfeiffer. En 2010, il réalise son 21ème film de cinéma, Tamara Drewe dans lequel il met en scène l'actrice Gemma Arterton.

Confident Royal - Bande annonce en VF (2017)


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Terry Gilliam

Anglais d'adoption, Terence Vance Gilliam est né le 22 novembre 1940 à Minneapolis (Minnesota). Il a onze ans quand sa famille s'installe à Los Angeles, où il fait ses études à la Birmingham High School puis étudie la physique, les beaux-arts et les sciences politiques. Il décroche une licence en sciences politiques. Durant ses études universitaires, il dirige un magazine satirique. De 1962 à 1965, à New York, rédacteur-adjoint du magazine « Help », il fait la connaissance de John Cleese et Graham Chapman. Il voyage un an en Europe et participe au journal « Pilote » en 1965. Après un bref retour dans son pays, il émigre à Londres en 1967. Il publie des dessins dans différentes revues et retrouve John Cleese qui le présente à Humphrey Barclay, producteur de télévision. Barclay lui achète deux sketches et l'engage.

C'est en participant à l'émission « Do not Adjust your Set » qu'il rencontre Eric Idle, Terry Jones et Michael Palin. Avec eux, Graham Chapman et John Cleese, il fonde en 1969 les Monty Python, groupe comique à l'humour dévastateur. Ensemble, ils conçoivent et écrivent la série « Monty Python's Flying Circus » diffusée à la télévision britannique d'octobre 1969 à décembre 1974. Gilliam devient co-scénariste, interprète et réalisateur mais surtout le plasticien du groupe, le spécialiste de l'animation. Pataquesse de Ian MacNaughton, auquel Gilliam collabore, une anthologie de leurs sketches pour la BBC, les fait découvrir au grand public. Parallèlement, il réalise plusieurs génériques d'émissions et des courts métrages d'animation dont The miracle of flight et Story time. Trois ans plus tard, il réalise avec Terry Jones Monty Python sacré graal sur un scénario collectif. En 1977, Terry Gilliam réalise seul son premier film, Jabberwocky, une fable médiévale. Il s'éloigne des Monty Python après Le sens de la vie et poursuit sa carrière en solo.

Décrivant avec humour et effroi un univers à la George Orwell, Brazil (1985) est un magnifique film baroque et visionnaire, un regard porté sur la société américaine que seul un humour décapant réussit à rendre supportable : « L'Amérique vous bombarde de rêves et vous prive des vôtres... c'est pour cela que j'ai quitté l'Amérique et c'est de cette confusion que parle Brazil » déclare t-il. Il livre ensuite sa version des Aventures du Baron de Munchausen, où les effets spéciaux sont au service d'une imagination extravagante. Fable moderne sur la générosité, interprétée par Robin Williams et Jeff Bridges, FISHER KING obtient le Lion d'Or à Venise en 1991. Mêlant apocalypse et voyage dans le temps, L'armée des douze singes avec Bruce Willis et Brad Pitt, est adapté de La jetée, court métrage de Chris Marker. Johnny Depp et Benicio Del Toro mènent LAS VEGAS PARANO, adaptation délirante (et fidèle) du roman de Hunter S. Thompson. En 2000, Terry Gilliam tente de réaliser un vieux rêve : sa version du « Don Quichotte » de Cervantès, avec THE MAN WHO KILLED DON QUIXOTE, interprété par Jean Rochefort et Johnny Depp. Mais le tournage est frappé de plusieurs calamités qui l'empêcheront d'être mené à son terme, ce qui fera l'objet d'un documentaire : LOST IN LA MANCHA, de Keith Fulton et Louis Pepe (2002) . C'est ensuite dans le monde féerique des Fères Grimm que Terry Gilliam situe sa nouvelle aventure.

Les génériques de Terry Gilliam
 

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Les Monthy Python

Monty Python est le nom d'une troupe d'humoristes rendue célèbre initialement grâce à sa première création, la série télévisée Monty Python's Flying Circus dont la diffusion commença à la BBC le 5 octobre 1969 et qui se poursuivit durant 45 épisodes jusqu'au 5 décembre 1974. La troupe était composée de six membres : Graham Chapman, John Cleese, Eric Idle, Michael Palin, Terry Jones et Terry Gilliam. La majorité des membres du groupe sont anglais sauf pour Terry Gilliam qui vient des États-Unis et Terry Jones qui est d'origine galloise.

L'humour du groupe prend ses racines dans le burlesque absurde de l'émission d'avant-guerre ITMA (It's that Man Again !) sur la BBC ainsi que sur The Goon Show (émission d'humour radiophonique de Peter Sellers et Spike Milligan).

Inspirée par leurs premières années de théâtre, leur œuvre fondatrice (le Flying Circus) remet en cause tous les principes des émissions télévisées. Leur influence dans le domaine comique est comparée à celle des Beatles dans la musique. Elle dépasse largement les frontières du Royaume-Uni et du monde anglo-saxon. En France, Alain Chabat et les Robins des Bois notamment s'en réclament. Dans la langue anglaise, le mot Pythonesque, inventé pour décrire leur humour, a trouvé son chemin vers les dictionnaires.

En 1971, ils rejouent une sélection de leurs sketches pour le long-métrage La Première Folie des Monty Python (And Now for Something Completely Different). Le film sort discrètement en France sous le titre Pataquesse en 1974 avec une affiche dessinée par Gotlib.

Après l'arrêt du Flying Circus en 1974, le groupe mène une carrière au cinéma avec des longs-métrages qu'il réalise lui-même :

En 1980, une retranscription filmée de leur spectacle donné au Hollywood Bowl sort sous le titre Monty Python à Hollywood (Monty Python Live at the Hollywood Bowl).

Chaque membre poursuit ensuite des projets de cinéma ou de télévision, souvent en travaillant en collaboration. Certains de leurs projets rencontrent le succès comme Brazil (réalisé par Terry Gilliam en 1985, avec Michael Palin), Un poisson nommé Wanda (en 1988, avec John Cleese et Michael Palin), ou encore Les Aventures du baron de Münchhausen (par Terry Gilliam, en 1989, avec Eric Idle). Graham Chapman décède en 1989. Les cinq membres survivants se retrouvent quelquefois, comme en 1998 dans Live At Aspen.

Le 19 novembre 2013, Terry Jones annonce la reformation du groupe et le projet d'un nouveau spectacle comique. Une conférence de presse, tenue au Palace Theatre de Londres jeudi 21 novembre, officialise la reformation des Monty Python2. Les Python se produisent finalement à l'O2Arena de Londres pour 10 spectacles qui affichent tous complet en juillet 2014.

Un sketch des Monty Python

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Max Ophuls

Maximillian Oppenheimer, dit Max Ophüls (ou Max Ophuls),

est un cinéaste français d'origine allemande, né à Sarrebruck le 6 mai 1902 et mort à Hambourg le 25 mars 1957. I

Il est le père du documentariste Marcel Ophüls.


 

Il débute au théâtre comme acteur stagiaire en 1919 sous le pseudonyme de Max Ophüls, afin de ne pas embarrasser son père au cas où il échouerait, avant de se consacrer à la production en 1924. Deux ans plus tard, il devient directeur de création du Burgtheater à Vienne. Il y rencontre l'actrice Hilde Wall (1894-1980), qu'il épouse la même année. Leur fils Marcel, futur réalisateur de documentaires (notamment Le Chagrin et la Pitié), naît le 1er novembre 1927 à Francfort-sur-le-Main.

Après avoir monté près de deux cents pièces, il se tourne en 1929 vers le cinéma, en devenant chef-dialoguiste sous la direction d'Anatole Litvak à la Universum Film AG (UFA), à Berlin. Il dirige son premier film en 1931, le court-métrage Dann schon lieber Lebertran. Le meilleur de ses films allemands est sans doute Liebelei (1932) ; on y trouve un certain nombre de thèmes qui ont fait sa célébrité : pureté des femmes (qui ne va pas sans une certaine frivolité, et parfois une grande naïveté), cruauté, violence des hommes et d'une façon générale, de la société qui, sous des dehors brillants, scintillants, se révèle être une machine à broyer les plus faibles, etc.

Anticipant la menace que fait courir la montée du nazisme, Max Ophüls, qui est de confession juive, se réfugie en France en 1933 après l'incendie du Reichstag. Il y réalise entre autres Werther, adaptation du roman homonyme de Goethe avec Pierre Richard-Willm, et deux films avec Edwige Feuillère, Sans lendemain et De Mayerling à Sarajevo. Devenu citoyen français en 1938, il gagne les États-Unis après la défaite de 1940, en passant par la Suisse et l'Italie. Réfugié à Hollywood, il n'y trouvera toutefois pas de travail, et il doit attendre 1948 pour réaliser, avec l'aide du réalisateur et producteur Preston Sturges, qui admire son travail depuis longtemps, l'un des films les plus remarquables de cette période : Lettre d'une inconnue, librement adapté de la nouvelle de Stefan Zweig.

Il revient en Europe en 1950, pour tourner une série de chefs-d'œuvre : La Ronde (1950), Le Plaisir (1952), Madame de... (1953), avec son actrice fétiche, Danielle Darrieux, ainsi que Lola Montès (1955). Ce dernier film ne rencontra pas le succès, et fit l'objet d'un nouveau montage de la part des producteurs, malgré l'opposition d'Ophuls et celle des « jeunes turcs » de la naissante Nouvelle Vague, avant de connaître finalement une résurrection en 2008.

Il meurt à Hambourg sept ans plus tard, d'une cardiopathie rhumatismale. Il est incinéré au cimetière du Père-Lachaise (case 6219 du columbarium) à Paris.

Dans toutes ses œuvres, on retrouve les mouvements sans heurts de la caméra qui le caractérisent, l'utilisation complexe des grues et des dollys, et les travellings, qui ont influencé Stanley Kubrick ou, en France, Jacques Demy (dont le premier film, Lola, est dédié à celui qu'il considérait comme son maître).

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Maurice Pialat

1925-2003

1- Mise en scène

Aucun personnage de Pialat ne choisit d'être contre la vie ou en dehors d'elle. Si tous souffrent ou font souffrir, c'est parce que la vie leur échappe ou qu'elle les rejette, qu'ils soient orphelins, abandonnés, mourants, quittés par l'être aimé, en proie à une vocation qui les écrase. A l'origine, pour chacun, une catastrophe initiale, une faille, une blessure, souvent le sentiment d'un abandon, qui les coupent de la vie. Et ce n'est qu'en appuyant sans cesse sur cette blessure, en remuant le fer dans la plaie, qu'il peut rejoindre la vie.

Révolté devant une jeunesse foutue, une vie ratée, un amour détruit ou une foi perdue, Pialat inscrit son cinéma dans le courant des cinéastes où la vérité se dégage du corps souffrant du personnage. Avec sa caméra toujours à bonne distance, qui le distingue d'un cinéaste comme Cassavetes, Pialat filme à vif, façonne une image dépouillée de tout artifice afin de cerner l'essentiel : la vérité intime des personnages ; vérité des sentiments, qu'il s'agisse des rapports familiaux ou des rapports amoureux, vérité des extérieurs, vérité du jeu des acteurs. "Le cinéma c'est la vérité du moment où l'on tourne."

Les plans-séquences qui structurent la plupart de ces films donnent aux acteurs une importance maximale. En contre-partie Pialat exige d'eux qu'ils renoncent à toute convention et investissent complètement leurs rôles. Cette équivalence entre vérité intime du personnage et vérité intime de l'acteur est souvent obtenue avec une brutalité verbale dont certains acteurs se sont plains. Pialat, omniprésent, autoritaire, obsédé par ce qu'il veut obtenir procède pourtant à l'inverse de Clouzot, autre despote des plateaux, pour qui les acteurs, loin de devoir révéler l'intimité de leur être, n'étaient que des marionnettes au sein d'une mise en scène corsetée.

2-Biographie

Né le 31 août 1925 à Cunihat dans le Puy-de-Dôme, Maurice Pialat prépare d'abord une école d'architecture. Après la guerre, il se tourne vers la peinture et fréquente pendant plusieurs années l'École des arts décoratifs et celle des Beaux-Arts de Paris. Dès le début des années cinquante, entre deux métiers et quelques cours de théâtre, avec une caméra amateur, il s'amuse déjà à tourner quelques petits films.

En 1960, il commence à travailler comme assistant sur des tournages pour le cinéma et la télévision et réalise L'amour existe, un court métrage documentaire qui sera primé au festival de Venise et obtiendra le prix Louis-Delluc. Fort de ce succès, l'année suivante, il met en scène, pour la télévision, un deuxième court métrage (Janine), de fiction cette fois, d'après un scénario de Claude Berri. De 1963 à 1966, il se consacre presque exclusivement à des réalisations pour le nouveau média (films de voyages, documentaires pour la série "Les chroniques de France"…).

En 1969, L'enfance nue propulse Pialat sur le devant de la scène. Ce film bouleversant sur un gamin de l'Assistance publique est acclamé par les critiques. Il obtient le prix Jean-Vigo et des récompenses aux festivals de Venise et de New York. La même année, Claude Chabrol lui propose de jouer le rôle du commissaire de police dans Que la bête meure. Taciturne et peu loquace, il y impose sa lourde stature.

En 1970 et 1971, il travaille de nouveau pour la télévision qui lui a confié la réalisation d'une série de fiction (La Maison des bois) en sept épisodes d'une heure.

A partir de son deuxième film Nous ne vieillirons pas ensemble, sélectionné au Festival de Cannes, en 1972, et couronné par le prix d'interprétation masculine de Jean Yanne, il se consacre entièrement au cinéma. Sur la lancée du bon accueil que reçoit cette histoire d'un homme lassé de sa vie de couple et d'une femme qui affirme peu à peu sa personnalité face à ce mari de plus en plus odieux, il réalise successivement La Gueule ouverte (1974), douloureuse et poignante description des derniers instants d'une femme entourée par son mari, son fils et sa belle-fille. Passe ton bac d'abord (1978-1979), présente l'autopsie d'un groupe d'adolescents du nord de la France, copains et copines sans illusion, et Loulou (1980), conte l'adultère d'une petite bourgeoise attirée par la marginalité d'un loubard. Sélectionné au festival de Cannes, ce dernier film scelle aussi la rencontre de Maurice Pialat et Gérard Depardieu.

A nos amours (1983) est son premier grand succès public. En effet, ses films précédents (à part peut-être Nous ne vieillirons pas ensemble) avaient avant tout été appréciés par les critiques et faisaient surtout de belles carrières dans les ciné-clubs. Ce portrait cinglant et âpre d'une jeune fille en plein désarroi, dans une famille bouleversée (le rôle du père est tenu par Pialat lui-même), considéré par beaucoup comme un chef-d'œuvre, est récompensé par deux Césars (meilleur film ex aequo avec Le Bal d'Ettore Scola, meilleur espoir féminin pour Sandrine Bonnaire) et le prix Louis-Delluc 1983.

Police (1985), anatomie d'un commissariat de quartier dans lequel un inspecteur de police est confronté au doute ; Sous le soleil de Satan (1987) d'après l'œuvre de Georges Bernanos, évoque le combat spirituel, la quête d'absolu d'un humble curé de village. Gerard Depardieu incarne l'inspecteur de Police et le curé de Sous le soleil de Satan où Sandrine Bonnaire est sa partenaire. Un poing levé face aux sifflets d'une partie des spectateurs, une phrase en conclusion de ses " remerciements " : "Sachez que si vous ne m'aimez pas, je ne vous aime pas non plus ", lorsqu'il s'empare de la Palme la cérémonie de remise des prix du Festival de Cannes vont créer un malaise entre le grand public et lui. Écorché vif, furieux de voir la décision du jury contestée, il se refermera un peu plus sur lui-même.

Il faut attendre 1991 pour découvrir Van Gogh, vision d'un réalisateur-peintre sur un artiste en décalage avec son temps. Les images sont somptueuses, la construction narrative d'une grande intelligence. Quant au jeu acéré de Jacques Dutronc, il lui vaudra le César 1992 du meilleur acteur. En 1995, il renoue avec cette vérité des sentiments dans les rapports amoureux et familiaux et retrouve une fois encore Gérard Depardieu pour Le Garçu. Cette chronique douce-amère autour d'un père insupportable et grande gueule, fou d'amour et invivable, de femmes entre deux rives s'avère aussi un regard sensible et pathétique sur l'enfance. Avec ses yeux immenses et l'inconscience de son âge, sa joie de vivre et ses caprices, le petit Antoine (joué par le propre fils du réalisateur) profite des rapports " perturbés " de ses parents autant qu'il les subit.

Maurice Pialat et la Nouvelle Vague

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Jean-Paul Rappeneau

Jean-Paul Rappeneau , né en 1932.

Jean-Paul Rappeneau débute au cinéma comme assistant. Il collabore notamment à des courts métrages d'Edouard Molinaro. Puis il s'essaie au scénario. En 1958, il travaille sur une adaptation des Trois Mousquetaires pour Jacques Becker, mais le projet s'arrête avec le décès du réalisateur. En 1959, il co-écrit le scénario de Signé Arsène Lupin d'Yves Robert. Son talent se confirme dans ses collaborations avec Louis Malle : Zazie dans le métro, d'après Raymond Queneau, en 1960 et Vie privée en 1961. En 1964, il co-signe le scénario de L'homme de Rio de Philippe de Broca. Les trépidantes tribulations de Jean-Paul Belmondo rencontrent un énorme succès.

Après avoir écrit pour les autres, Jean-Paul Rappeneau se consacre à son premier film en tant que réalisateur et scénariste. La vie de château remporte le prix Louis-Delluc en 1966. Malgré un succès public et critique, Rappeneau s'absente des écrans pendant cinq ans. En 1971, il revient avec Les Mariés de l'an II, incarnés par Jean-Paul Belmondo et Marlène Jobert. En 1973, il retrouve le tandem De Broca/Belmondo pour Le Magnifique, dont il est une nouvelle fois le co-scénariste.

A partir de 1975, Jean-Paul Rappeneau met ses talents de scénariste au service de ses réalisations seulement. Auteur complet, il écrit et met en scène les aventures rocambolesques du Sauvage, incarné par Yves Montand. Le film est un succès, public. Perfectionniste, le cinéaste prépare longuement ses projets, ce qui explique les longs moments d'absence qui jalonnent sa carrière. Voilà pourquoi Jean-Paul Rappeneau attend six ans avant de sortir Tout feu tout flamme (1981). Il y retrouve Yves Montand, cette fois en compagnie d' Isabelle Adjani. Le film est encore plébiscité par les spectateurs.

Long silence à nouveau, puis en 1990, Jean-Paul Rappeneau crée l'évènement avec Cyrano de Bergerac. La critique salue son adaptation de la pièce d'Edmond Rostand. Gérard Depardieu excelle en Cyrano. Fort de ce succès, Rappeneau décide de porter à l'écran Le hussard sur le toit de Jean Giono, roman célèbre et réputé difficile à adapter.

En 2003 sort Bon voyage. Le film bénéficie d'un scénario original et d'un casting prestigieux. Il marque les retrouvailles de Jean-Paul Rappeneau, Gérard Depardieu et Isabelle Adjani.

l'Ami américain

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Éric Rohmer

1920 - 2010

Né le 4 avril 1920, à Tulle, de son véritable nom Jean-Marie Maurice Scherer, Eric Rohmer acquit une formation essentiellement littéraire qui le destina tout naturellement à l'enseignement ainsi qu'à une carrière de romancier qui n'eut pas de suite après la parution chez Gallimard, en 1946, de Elisabeth. Ce n'est que très tardivement qu'il s'orienta vers le cinéma en empruntant la voie de la critique. Il fut successivement rédacteur à La Revue du Cinéma, Les Temps Modernes, Arts puis rédacteur en chef de La Gazette du Cinéma en 1959 et des Cahiers du Cinéma de 1957 à 1963. Il débute dans la réalisation avec un court-métrage interprété par le scénariste Paul Gégauff et dont il ne reste plus aucune trace puis entreprend deux ans plus tard son premier long métrage, Les petites filles modèles, qui reste inachevé.

A l'heure où ses amis de la nouvelle vague font leurs premières armes, Eric Rohmer s'essaye à nouveau dans la mise en scène avec Le signe du Lion produit par Claude Chabrol. Malheureusement, le film reste bloqué trois ans. Cet échec, associé à une discrétion naturelle, fit que son nom resta dans l'ombre de ceux de Truffaut, Godard et Chabrol.

Les six contes moraux

Tout en continuant ses activités de critique (il publie notamment un ouvrage sur Hitchcock avec Claude Chabrol), Eric Rohmer entreprend la réalisation d'un vaste projet, une série de six contes moraux axés sur un thème identique :

"Tandis que le narrateur est à la recherche d'une femme, il en rencontre une autre qui accapare son attention jusqu'au moment où il retrouve la première."

Ce thème restitué à l'état pur dans La boulangère de Monceau (Sylvie, boulangère, Sylvie), subira un certain nombre de transformations par l'adjonction de nouveaux motifs. Le conte n° 2 : La carrière de Suzanne (Suzanne, Sophie, Suzanne) est un moyen métrage également réalisé en noir et blanc avec ses amis des Cahiers. Le conte suivant La collectionneuse (Majinou, Haydée, Majinou), auquel Rohmer attribuera par la suite le n°4, opte malgré son petit budget pour la couleur, afin de mieux restituer l'atmosphère du Midi. Ce film attira l'attention sur son auteur et lui permit de réaliser les trois contes suivants (Ma nuit chez Maud (Françoise, Maud, Françoise), Le genou de Claire (Épouse, Claire, épouse) et L'amour l'après midi (Epouse, Chloé, épouse) avec les acteurs professionnels indispensables pour interpréter les protagonistes plus âgés.

Pendant toutes ces années, malgré une activité pédagogique parallèle et la réalisation d'émissions de la TV scolaire et de la série Cinéastes de notre temps (Carl Dreyer, Le celluloïd et le marbre), le nom de Rohmer fut essentiellement lié à celui des Contes moraux dont il se réclame l'unique auteur :


"L'ambition du cinéaste moderne, et qui fut aussi la mienne, est d'être l'auteur à part entière de son œuvre, en assumant la tâche traditionnellement dévolue au scénariste. Mais cette toute-puissance, au lieu d'être un avantage et un stimulant, est ressentie parfois comme une gêne. Être le maître absolu de son sujet, pouvoir y retrancher et y ajouter selon l'inspiration ou les nécessités du moment, sans avoir de compte à rendre à personne, cela vous grise, mais cela vous paralyse aussi : cette fatalité est un piège. Il importe que votre propre texte vous soit à vous-même tabou, sinon vous pataugez, et les comédiens à votre suite. "

Intermède historique

Et pourtant, les deux films suivant, seront des adaptations de textes littéraires d'origine et d'époque très différentes : La marquise d'O et Perceval le Gallois qu'il traduisit lui-même du texte ancien de Chrétien de Troyes.

Les six comédies et proverbes

Après Six Contes moraux, Eric Rohmer, qui aime se lancer des défis et s'imposer des contraintes, décide de tourner six Comédies et proverbes qui sont au théâtre ce que les Contes étaient à la littérature. Plus de récit à la première personne, de commentaire off, mais un dialogue qui semble pris sur le vif, écrit spécialement pour de très jeunes comédiens.

Quatre contes des quatre saisons

Fidèle à son goût des séries, Eric Rohmer décide de tourner les Contes des quatre saisons, où les personnages discutent à perdre haleine sur de possibles machinations ou d'impossibles décisions.

Comme dans tout conte pour enfants, il existera une logique du chiffre trois : dans Conte de printemps il y a trois appartements, trois hypothèses, trois voeux, dans Conte d'hiver trois hommes entre lesquels Félicie a fait son choix dans Conte d'été trois filles entre lesquelles Gaspard charge le hasard de choisir pour lui et dans Conte d'automne Saint-Paul-Trois-Châteaux et des variations infinies sur des relations triangulaires.

Le triptyque historique final

Avec L'Anglaise et le Duc, Triple agent et Les amours d'Astrée et de Céladon Rohmer retrouve une source d'inspiration dans la confrontation à l'histoire et la littérature de La marquise d'O et Perceval le Gallois.

Six Contes moraux, six Comédies et proverbes, quatre Contes des quatre saisons et cinq films historiques, ce sont ainsi vingt et un films de Rohmer répartis en quatre séries. En sont exclus cinq films qui auraient très bien pu, par leurs thèmes ou leur forme, trouver leur place dans les séries.

Il s'agit de, Le signe du Lion, son premier film, de Place de l'étoile qui interrompent la série des Contes moraux, de Quatre aventures de Reinette et Mirabelle qui interrompt celle des Comédies et proverbes et L'arbre le maire et la médiathèque et Les rendez-vous de Paris qui se situent au milieu des Contes des quatre saisons.

A ces vingt-six films sortis en salle on rajouter sept documentaires ou pièces filmées et vingt-deux courts métrages.

Une mise en scène qui confronte réel et imaginaire

Au delà de sa facilité à se prêter à des classifications simples, l'oeuvre de Rohmer se révèle extrêmement cohérente. Il s'agit toujours pour le personnage de prendre une décision en puisant ses arguments dans son imaginaire.

Dans Les contes moraux, d'inspiration littéraire, le discours du narrateur vise à expliciter ses actes et à le justifier aussi bien au regard du spectateur qu'à ses propres yeux. Il s'agit d'introspection, et l'on aura affaire à des personnages introvertis, se regardant vivre et agir, se posant des problèmes de morale et de conduite personnelle.

Dans Les comédies et proverbes, d'inspiration théâtrale, les personnages tentent par leur discours, et le plus souvent par leurs mensonges, d'imposer aux autres une image d'eux-mêmes, et leur problème serait plutôt de se confronter à des normes sociales que de se donner une ligne de conduite personnelle. L'intrigue développe des événements relativement plus amples et provoque des affrontements de personnage à personnage (et non plus de soi à soi). La jubilation que procure cette série ne tient pas seulement à la précision et à l'élégance des mouvements de caméra, mais aussi à un certain bonheur de vivre.

"Si, en apparence, dit Eric Rohmer, les quatre premières Comédies se terminent mal, c'est un malheur qui laisse intact l'espoir, alors que le bonheur des épilogues des Contes avait un goût de tristesse."

Dans Les contes des quatre saisons, les personnages ne se leurrent pas, ne leurrent pas les autres. La confrontation des discours est vaine mais pourtant source de vie. Elle permet parfois le miracle (rencontre, collier). Vision finalement assez optimiste de contes qui ne sont pas moraux cette fois mais ludiques.

Un film de Rohmer superpose deux espaces : celui strictement objectif de la réalité que nous décrit la caméra et celui, subjectif, que se construit imaginairement le personnage central. Ce personnage souffre d'une légère hypertrophie du moi et de la mauvaise conscience qui en résulte. Il en rend compte par le commentaire (off ou in).

L'être humain n'est pas une caméra. Il ne voit le monde que reflété par sa conscience, déformé par sa subjectivité. La confrontation du discours (le dispositif que propose le personnage principal) se heurte toujours à la réalité de la confrontation avec le corps de l'autre, têtu et moins malléable que le voudrait le personnage central.

Si le discours est toujours très écrit, original et éminemment subjectif, l'image est voulue radicalement objective, pure contemplation du monde, épurée, tant que faire ce peut, de toute tricherie, de tout manquement à la représentation des choses. Elle ne saurait mentir. L'utiliser autrement reviendrait à trahir sa nature mais surtout ne présenterait aucun intérêt. Restituer une vision subjective reviendrait à plagier ce que d'autres arts qui n'utilisent pas des matériaux directement puisés dans la réalité sont plus aptes à évoquer, et mènerait le 7ème art dans une impasse. Contrairement à la peinture, la littérature, la poésie, la musique ou la danse, le cinéma n'est pas un art de la métaphore ou de la suggestion, mais de la désignation. L'œuvre cinématographique de Rohmer va utiliser toutes les ressources de la dualité image-son, objectivité-subjectivité, vérité-mensonge.

Une économie de production adaptée à un public fidèle

" Je me sens absolument libre en tant que cinéaste et je tiens à le rester. Je veux éviter de me laisser piéger par le succès. Je n'aimerais pas avoir un trop grand nombre d'entrées ; je préfère un petit public satisfait. Je ne cherche pas le phénomène de mode. "

C'est en effet un public limité, mais fidèle, qui applaudit depuis bientôt quatre décennies chacun des films qu'Éric Rohmer, un peu à la manière d'un Woody Allen, réalise avec une régularité créatrice et une constance dans l'inspiration à nul autre pareil dans le cinéma français.

Aucun de ses vingt-sept films ne figure en tête des recettes : quelques-uns, comme Les nuits de la pleine lune, Le rayon vert ou L'ami de mon amie, ont franchi la barre des 200 000 entrées en exclusivité parisienne ; mais presque tous rassemblent entre 50 000 et 200 000 spectateurs, chiffre largement suffisant pour amortir leur coût qui est égal, voire inférieur, à la moitié du budget moyen nécessaire à la fabrication d'un film français.

Car Éric Rohmer, maître-artisan hostile par principe à tout ce qui est, à ses yeux, gâchis ou superflu, travaille naturellement à l'économie, en créateur libre de toute contrainte hors celles, artistiques, qu'il s'impose. Ainsi privilégie-t-il extérieurs et décors naturels, avec une prédilection marquée pour la province (Annecy, Clermont-Ferrand, Saint-Jean-de-Luz, Dinard, Granville, Le Mans...) et la banlieue parisienne (Marne-la-Vallée, Cergy-Pontoise...). Son équipe est réduite au minimum et composée de collaborateurs rompus à ses méthodes de travail : les directeurs de la photo Nestor Almendros, Bernard Lutic, Luc Pagès, Diane Baratier, Sophie Maintigneux, filment - avec, si possible, une caméra 16 mm, plus légère et maniable que la caméra 35 mm dite professionnelle - les acteurs devenus familiers de la saga rohmérienne : Arielle Dombasle, André Dussollier, Pascal Greggory, Amanda Langlet, Fabrice Luchini, Marie Rivière, Béatrice Romand, Rosette... Économe sur les moyens, Rohmer ne l'est pas sur le temps, se réservant celui de nombreuses répétitions avec des comédiens qu'il encourage à improviser lorsqu'il les sent totalement imprégnés de leur personnage et de leur texte.

... et à une critique toujours élogieuse

S'il peut compter sur un public acquis à son style comme à son univers, Éric Rohmer est, tout autant, assuré d'un soutien quasi unanime de la critique. Celle-ci lui a consacré de substantielles études et analyses et lui a décerné le Prix Louis-Delluc pour Le genou de Claire et le Prix Méliès pour Ma nuit chez Maud, Le genou de Claire, Perceval le Gallois, Pauline à la plage et Les nuits de la pleine lune. En revanche, il est surprenant de constater que le cinéaste, ses films, ses techniciens et interprètes n'ont jamais obtenu le moindre César : Les nuits de la pleine lune, en dépit de cinq nominations - meilleurs film, réalisateur, scénario, actrice et second rôle masculin - fut oublié lors de la remise des récompenses. Tout aussi surprenante est l'absence quasi totale de l'œuvre de Rohmer dans la Sélection officielle comme au palmarès du Festival de Cannes, La marquise d'O, Grand Prix spécial du Jury en 1976 et le moins caractéristique de ses films, étant l'exception qui confirme la règle. Une règle que ne suivent pas les grands festivals étrangers, comme celui de Venise, qui a décerné un Lion d'or au rayon vert et un prix d'interprétation à Béatrice Romand (Un beau mariage), Pascale Ogier (Les nuits de la pleine lune) et Marie Rivière (Le rayon vert) et celui de Berlin, où La Collectionneuse reçut un Prix spécial et Éric Rohmer celui de la mise en scène pour Pauline à la plage.

En 1979, Éric Rohmer avait assuré la mise en scène théâtrale de Catherine de Heilbronn, la pièce d'Heinrich von Kleist. Il est revenu sur les planches en 1987 pour diriger sa pièce Le Trio en mi bémol avec Jessica Forde et Pascal Greggory.

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Claude Sautet

1924 -2000

C'est à Montrouge que voit le jour Claude Sautet le 23 février 1924. Une grand-mère cinéphile lui donne très tôt la passion du cinéma, et l'envie d'en faire un métier. Il est sculpteur, peintre de décors, à l'occasion comédien (avec les Comédiens routiers), et il fait un passage éclair aux Arts décoratifs. Pendant la guerre, sa rencontre fortuite avec un monteur de film lui permet de faire son premier stage de montage. Il est par ailleurs passionné de musique et va, pendant quelque temps, exercer la fonction de critique musical au journal " Combat".

En 1948, il entre à l'IDHEC et à sa sortie devient septième assistant sur le film de Claude Autant-Lara Occupe-toi d'Amélie. En 1950, il tourne un court métrage : Nous n'irons plus au bois. En 1959, il sera l'assistant de Georges Franju pour Les yeux sans visage. Entre-temps, il a co-écrit, avec Jean Redon, le scénario du film Le fauve est lâché, dont la vedette est Lino Ventura. Il a remarqué ce comédien dans Touchez pas au grisbi ; il va devenir son ami, puis son interprète dans Classe tous risques (son second long métrage après Bonjour sourire, comédie avec Henri Salvador et Annie Cordy passée inaperçue). C'est un insuccès commercial, mais ce film d'un ton nouveau lui attire d'emblée la sympathie de nombreux critiques.

Il va néanmoins rester sans tourner quatre ans durant, jusqu'à cette Arme à gauche, nouvelle adaptation de roman policier, avec Lino Ventura, dont l'insuccès public (mais aussi critique) le replonge dans cette carrière parallèle où il a excellé, celle de scénariste-synthétiseur (Peau de banane, Symphonie pour un massacre, La vie de château, Maigret voit rouge, Mise à sac, La chamade, Le diable par la queue, Les mariés de l'an II, Borsalino). Pour ses pairs, il est devenu le chirurgien de la dernière chance, le seul qui puisse sauver un scénario ou un montage en difficulté.

Les choses de la vie, Prix Louis-Delluc 1970, est le résultat positif d'une longue carrière souterraine. Il cristallise ses obsessions, marque sa passion pour les acteurs, affirme son sens du rythme et son goût de la musique. Sautet trouve un large public au diapason de sa sensibilité angoissée. Le voilà maintenant à une place enviable au box-office. Avec la complicité du scénariste Jean-Loup Dabadie, du musicien Philippe Sarde et de l'opérateur Jean Boffety, il se met à ausculter la société française contemporaine, tout en poursuivant la construction de son univers.

Public et critiques suivent sa démarche avec intérêt. Sautet leur est fidèle, tout comme il reste fidèle à ses interprètes des Choses de la vie, Romy Schneider et Michel Piccoli. Avec César et Rosalie, Sautet découvre en Yves Montand un nouveau complice. Mais le réalisateur ne se contente pas de soigner les rôles principaux : avec lui, tous les seconds roles font partie de l'orchestre qu'il dirige avec brio.

Il n'a pas son pareil pour révéler des comédiens : ainsi Isabelle Huppert dans César et Rosalie, Gérard Depardieu dans Vincent, François, Paul et les autres, Ottavia Piccolo et Jacques Dutronc dans Mado, Claude Brasseur, Arlette Bonnard et Eva Darlan dans Une histoire simple. Ces deux dernières réalisations dénotent une plus vive inquiétude vis-à-vis du monde qui l'environne. Sans doute par fidélité au devoir qu'il s'est fixé et qu'il rappelle volontiers dans ses interviews : "etre un médium. "

Si la décennie soixante-dix se clôt, pour Claude Sautet, sur le succès public et critique de Une histoire simple (César de la meilleure actrice pour Romy Schneider et nomination à l'Oscar du meilleur film étranger), le début des années quatre-vingt voit le cinéaste s'interroger sur la suite de sa carrière.

En effet, il avait jusqu'alors consacré le meilleur de son talent à la peinture d'une génération, la sienne, et d'un milieu, cette classe moyenne d'origine populaire qui doute de la pérennité de son apparente réussite sociale. Craignant l'auto-attendrissement et les redites, Sautet choisit alors, avec Un mauvais fils, de se pencher sur la génération des vingt/trente ans et d'évoquer les problèmes liés à l'usage de la drogue dans cette tranche d'âge ? En même temps, par l'intermédiaire du personnage du père incarné par Yves Robert, il aborde les rapports conflictuels entre la jeunesse et ses aînés et met en cause l'égoïsme et le conformisme de ces derniers.

Patrick Dewaere, ici dans l'un de ses meilleurs rôles, définira son metteur en scène comme un «filmeur entre les lignes», confirmant par là que le domaine privilégié de Sautet demeure, quel que soit le sujet de ses films, celui des élans du coeur et du non-dit des sentiments. Garçon !, dont le scénario original fut profondément modifié par Yves Montand contre la volonté du cinéaste, n'est pas l'oeuvre favorite de ce dernier :

«C'était comme si je me parodiais. Tout était trop “à ma main”, ça risquait de devenir de l'automatisme... J'avais une impression de répétition, les mêmes acteurs, le même scénariste, les mêmes techniciens... Je n'avais plus ni idées ni envies (...). Le trou noir.» (in “Conversations avec Claude Sautet” (Michel Boujut, Institut Lumière, 1994).

Sautet se tourne alors vers la publicité : il réalise trois spots pour la SNCF. D'autres, pour une marque de purée instantanée, ne sont jamais diffusés. Puis, sans projet de film réalisable à court terme, il va longuement se consacrer, à la tête de la SACD, à la défense des droits des cinéastes dont il entend qu'ils soient considérés, dans les négociations avec les chaînes de télévision, comme les auteurs à part entière de leurs films, statut qui justifie leur légitime rétribution.

Après plusieurs années de silence, l'oeuvre de Claude Sautet prend un nouveau départ avec Quelques jours avec moi. Le cinéaste y trouve l'occasion de changer le cadre dans lequel il avait travaillé jusqu'alors, et de s'entourer de nouveaux collaborateurs. Le héros du film, incarné par Daniel Auteuil, étranger à lui-même et au monde qui l'entoure, apparaît tout aussi inédit dans la galerie des personnages habituels de Sautet.

Les deux films suivants ne confirmeront hélas pas ce renouveau. Un coeur en hiver et Nelly et monsieur Arnaud seront tous deux interprétés par Emmanuelle Béart, aux cotés de Daniel Auteuil et André Dussollier dans le premier, face à un Michel Serrault ressemblant de façon saisissante au réalisateur dans le second.

Un coeur en hiver (Lion d'argent au Festival de Venise) et Nelly et monsieur Arnaud ont valu à Claude Sautet le César du meilleur réalisateur. Nelly et monsieur Arnaud sera malheureusement le dernier film de Claude Sautet : le cinéaste est mort le 22 juillet 2000 à Paris, des suites d'un cancer du foie. À la question posée en mai 1987 par le journal "Libération", «Pourquoi filmez-vous ?», il répondit en ces termes, où se lit toute sa modestie :

«Parce que ça m'amuse. Parce que c'est d'abord un jeu – un peu privilégié – qui se joue à plusieurs (quelque chose comme le rugby), avec des règles incontournables - plus ou moins perceptibles – et destiné à cet autrui monstrueux, le public, ce partenaire sans visage. Parce que, enfant, je suis resté timide et muet longtemps. Parce que je n'ai jamais acquis la maîtrise du langage – je n'aimais que la musique. Et enfin que les hasards de la vie – et la chance – ont fait que c'est devenu pour moi le seul moyen de communiquer, plus ou moins confusément !». (in “Conversations avec Claude Sautet” (Michel Boujut, Institut Lumière, 1994).


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Ridley Scott

Sir Ridley Scott ,né le 30 novembre 1937 à South Shields, dans le Tyne and Wear, en Angleterre,

est un réalisateur et producteur britannico-américain, résidant aux États-Unis.

Il est révélé à la fin des années 1970 et durant les années 1980 par trois blockbusters : Alien, le huitième passager (1979), Blade Runner (1982) et Legend (1985).

Durant les années 1990, ses films connaissent moins de succès. Se détachent en 1992 Thelma et Louise et 1492 : Christophe Colomb.

Mais au début des années 2000, il fait un retour au premier plan remarqué en relançant le péplum avec Gladiator (2000). Il enchaîne ensuite avec des grosses productions : Hannibal (2001), La Chute du faucon noir (2002), Kingdom of Heaven (2005), alternant également avec des films plus modestes : Les Associés (2003) et Une grande année (2006). Il conclut cette décennie en menant trois gros projets avec l'acteur Russell Crowe : American Gangster (2007), Mensonges d'État (2008), Robin des Bois (2010) qui déçoivent commercialement.

Durant les années 2010, il revient avec succès à la science-fiction : Prometheus (2012), Seul sur Mars (2015) et Alien: Covenant (2017).

Ridley Scott est reconnu pour son style visuel très concentré et atmosphérique, qui a inspiré un grand nombre de réalisateurs.

Il a été nommé à trois reprises à l'Oscar du meilleur réalisateur, ainsi qu'aux Golden Globes et BAFTA Awards. En 2003, il est anobli par la reine Élisabeth II pour services rendus aux arts britanniques, et en 2015, il reçoit un doctorat honorifique par le Royal College of Art de Londres.

Il est le frère aîné du réalisateur Tony Scott (1944-2012) avec qui il a fondé la société de production Scott Free Productions en 1995.

Un BAFTA Award a récompensé leur contribution remarquable au septième art.

Un spot - Filmographie - Alien (Analyse)

Il est le père de trois enfants, tous réalisateurs : Jake, Luke et Jordan (également romancière).

Révélation en tant que cinéaste (années 1970-1980)

Les Duellistes

En 1977, à l'âge de 40 ans, il réalise Les Duellistes, son premier film qui obtient le prix de la meilleure première œuvre au Festival de Cannes. Produit en Europe, son succès commercial est limité aux États-Unis. Situé pendant la période des guerres napoléoniennes, il met en scène deux hussards, officiers de cavalerie français, Armand d'Hubert et Gabriel Féraud (joués respectivement par Keith Carradine et Harvey Keitel). Leur brouille, initiée par un incident très mineur, se transforme en une querelle amère et prolongée qui s'étendra sur les quinze années suivantes, et sera en interaction avec le cadre plus large des guerres qui restent toujours en toile de fond. Tiré d'une nouvelle de Joseph Conrad, Le duel, ce film a été remarqué pour la qualité de ses reconstitutions historiques : notamment pour les uniformes de l'armée napoléonienne et pour les manœuvres militaires à la manière de l'époque et, enfin, pour l'utilisation de techniques usitées au début du XIXe siècle et recréées par l'artificier William Hobbs.

Alien

La déception de Ridley Scott face à l'accueil mitigé fait aux Duellistes est alors amplifiée devant le succès que connaissait alors Alan Parker avec ses films (Scott a reconnu qu'il fut alors « malade pendant une semaine » de jalousie). Ridley Scott avait d'abord pensé à s'attaquer à une adaptation de l'opéra Tristan und Isolde, mais après avoir vu le premier épisode de Star Wars, il fut convaincu du réel potentiel que pouvaient avoir les films réalisés avec des effets spéciaux. Il accepta donc de réaliser Alien (1979), ce film entre l'horreur et la science-fiction proposé par la 20th Century Fox. Alien doit beaucoup au talent de Scott pour tout ce qui tient de la grande qualité de ses décors et des effets visuels si particuliers. De plus, l'accentuation faite sur le réalisme de l'histoire donne au film un caractère intemporel. Le film est un grand succès et obtient l'Oscar des meilleurs effets visuels en 1979.

Blade Runner

Après une année passée à travailler sur une adaptation du roman Dune de Frank Herbert, et après la disparition soudaine de son frère Franck, Scott signe pour réaliser l'adaptation au cinéma d'un roman de Philip K. Dick, intitulé Do Androids Dream of Electric Sheep?. Le rôle principal est donné à Harrison Ford et la musique, composée par Vangelis, est une réussite. Blade Runner sort sur les écrans en 1982 et en est retiré très vite. Cependant, il atteint le statut de « film culte » lorsqu'il passe à la télévision et est mis en vente en vidéo. Les notes de Scott sont alors réutilisées par Warner Bros. pour ressortir en 1991 une nouvelle version qui supprimait les voix off et modifiait la fin. Scott supervise personnellement la restauration numérique de Blade Runner et donne son approbation pour le montage final, qui sortit sur les écrans de Los Angeles, New York et Toronto le 5 octobre 2007. Cette version est ensuite distribuée en DVD en décembre 2008, dès que furent résolues certaines questions de droits entre la Warner Bros. et les garants du film. Aujourd'hui, Blade Runner est souvent classé par les critiques comme l'un des plus importants films de science-fiction du XXe siècle et on le considère généralement, avec le Neuromancer, roman de William Gibson, comme à l'origine du genre cyberpunk. Scott considère Blade Runner comme son « film le plus complet et le plus personnel ».

Thelma et Louise et 1492

En 1991, il renoue avec le succès grâce à Thelma et Louise avec Geena Davis et Susan Sarandon dans les rôles respectifs de Thelma et de Louise. Toutes les deux connaissent une période de découverte personnelle, d'amitié, et d'amour, alors qu'elles commettent un meurtre et sont obligées de fuir à travers les paysages américains. Ce crime va créer un lien entre les deux personnages. Harvey Keitel joue le rôle d'un sympathique détective qui essaie de résoudre l'affaire. Brad Pitt, dans un tout petit rôle, se fait remarquer par la profession. Ce film ravive la réputation de Scott comme auteur de films.

Il supervise ensuite la fabrication d'un film indépendant sur l'histoire de Christophe Colomb : doté d'un budget de moins de 50 millions de dollars, 1492 : Christophe Colomb est une co-production internationale menée par l'acteur français Gérard Depardieu dans le rôle-titre. Mais considéré comme sa réalisation la plus paresseuse, le film est un échec et éloigne Scott des plateaux de tournage pendant quatre ans.

En 1995, associé à son frère Tony, Ridley monte la société de production Scott Free Productions pour financer des projets télévisuels et cinématographiques, à Los Angeles. À partir de cette époque, tous ses films de genre, à commencer par Lame de fond et À armes égales (avec Demi Moore et Viggo Mortensen), sont produits sous le sigle de Scott Free. La même année, les deux frères ont aussi investi des intérêts dans les Studios de Shepperton, qui deviennent plus tard les Pinewood Studios.

En 2015, il revient à la science-fiction : il produit d'abord la série télévisée Le Maître du Haut Château, adaptée du roman éponyme de Philip K. Dick, et diffusée dès janvier 2015 sur Amazon Video.

Mais surtout, il met ensuite en scène un nouveau long métrage de science-fiction, Seul sur Mars (The Martian), adaptation du roman du même nom d'Andy Weir. Matt Damon y incarne un astronaute piégé sur la planète Mars devant survivre aux conditions hostiles à l'homme. Le film sort en octobre 2015 et est un gros succès aussi bien critique que commercial, avec 629 millions de dollars de recettes au box-office et 7 nominations aux Oscars dont une du meilleur film.

Ridley Scott confirme dans le registre de la science-fiction avec la suite de Prometheus, intitulée Alien: Covenant. Le film sort en mai 2017. Ridley Scott chapeaute en parallèle la production de Blade Runner 2049, suite de son film Blade Runner (1982), la réalisation étant confiée à Denis Villeneuve. Harrison Ford y reprend son rôle, aux côtés de Ryan Gosling. Le film sort en octobre 2017.

Début 2018, Scott déclare avoir une idée pour un troisième Blade Runner. En revanche, le projet Alien Awakening est supprimé du planning du studio Fox à la suite du rachat en cours de ce dernier par Disney. Le projet est donc reporté à une date indéterminée sans être annulé.


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Volker Schlöndorff

Volker Schlöndorff, né le 31 mars 1939 à Wiesbaden (Allemagne), est un cinéaste allemand.

Il est l'un des représentants majeurs du nouveau cinéma allemand des années 1960-1970 et l'un des fervents défenseurs du cinéma d'auteur européen.

 

Enfance et jeunesse

En 1956, Volker Schlöndorff, dont le père est médecin, quitte l'Allemagne de l'Ouest pour s'établir à Vannes en Bretagne dans un internat jésuite. Deux ans plus tard, Schlöndorff obtient le premier prix de philosophie du concours général alors qu'il est élève au lycée Henri-IV à Paris. Il est diplômé de l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC) et commence sa carrière en France comme assistant d'Alain Resnais (L'Année dernière à Marienbad), de Jean-Pierre Melville (Le Doulos, Léon Morin, prêtre) et de Louis Malle (Le Feu follet).

Débuts dans le cinéma

En 1966, encouragé par Louis Malle, dont il a été l'assistant réalisateur lors du tournage de Viva Maria !, il réalise à vingt-six ans son premier long métrage, Les Désarrois de l'élève Törless, tiré du roman homonyme de Robert Musil. Il y révèle sa maîtrise d'une forme fluide, l'acuité de son étude psychologique et son sens du récit. Le film obtient le Prix de la Critique internationale au 20e Festival de Cannes, ainsi que l'une des plus importantes distinctions ouest-allemandes, le Ruban d'argent.

Trois ans plus tard, il adapte Michael Kohlhaas de Heinrich von Kleist, ainsi que Baal (1969)

Années 1970 : reconnaissance internationale

En 1971, il épouse l'actrice, réalisatrice et scénariste allemande Margarethe von Trotta, dont il divorce en 1991.

Il réalise divers films qui obtiennent un petit succès en Allemagne sans néanmoins franchir les frontières du pays : La Soudaine Richesse des pauvres gens de Kombach (de) (1971), Feu de paille (1972) et Une nuit au Tyrol (1973).

Schlöndorff s'impose en Allemagne comme l'un des chefs de file du nouveau cinéma allemand grâce à son adaptation, en 1975, réalisée en compagnie de Margarethe von Trotta, du roman de Heinrich Böll (Prix Nobel de littérature 1972), L'Honneur perdu de Katharina Blum, critique acerbe de l'Allemagne des années de plomb. Lui succède Le Coup de grâce, d'après Marguerite Yourcenar.

En 1977, il s'unit à plusieurs personnalités artistiques ouest-allemandes, parmi lesquelles Heinrich Böll, A. Muge, Rainer Werner Fassbinder, pour réaliser un documentaire politique relatant les évènements tragiques survenus en Allemagne de l'Ouest. en octobre 1977, de l'enlèvement de Hanns-Martin Schleyer à la mort d'Andreas Baader : L'Allemagne en automne.

Le cinéaste obtient la reconnaissance internationale avec Le Tambour, tiré du livre d'un autre prix Nobel allemand, Günter Grass. Cette fresque dramatico-bouffonne délirante qui revisite de manière anticonformiste l'histoire de l'Europe centrale, de l'Allemagne et du nazisme à travers le parcours d'un garçon qui décide de ne plus grandir à l'âge de trois ans, est récompensée par la Palme d'or à Cannes en 1979 (ex æquo avec Apocalypse Now de Francis Ford Coppola). Elle gagne également l'Oscar du meilleur film étranger à Hollywood, l'année suivante.

Diplomatie, un des ses derniers films

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Martin Scorsese

Né en 1942

1- Mise en scène

Au début des années 2000, l'arrivée de Leonardo DiCaprio à la place de Robert De Niro comme acteur principal des films de Scorsese marque une inflexion dans sa mise en scène. L'expressionnisme, encore très présent dans Gangs of New York disparait progressivement derrière un symbolisme (évident dès Taxi driver) de plus en plus manifeste. En quelque sorte, le visage de Leonardo DiCaprio remplace le corps de Robert De Niro. Aviator et surtout Shutter island sont représentatifs de cette évolution où la violence expressionniste disparaît au profit d'un cinéma mental.

La problématique de l'échec qui hante le cinéma de Scorcese, basée sur l'angoisse de ne pas arriver à sortir de soi, est, en revanche, restée la même. Dans la première partie de son oeuvre, elle se décline dans une série d'oppositions

2- Biographie :

Martin Scorsese, petit-fils d'immigrants siciliens, est né le 17 novembre 1942 à Flushing (Long Island). Sa jeunesse passée dans le quartier populaire de Little Italy (New York) est fortement marquée par la religion catholique. Il entre même au séminaire préparatoire de la 86eme rue, mais son amour du rock and roll entraîne son renvoi.

Après des études à Cardinal Hayes High School, il entre à l'Université de New York en 1963. Alors que l'Amérique découvre la Nouvelle Vague française, Martin Scorsese s'intéresse surtout aux cours d'histoire du cinéma. C'est dans ce contexte scolaire qu'il réalise ses premiers courts-métrages.

Les éléments autobiographiques inspirent le début de sa filmographie, notamment dans Who's that knocking at my door ?, Mean streets et Italian american (un des épisodes de la série télévisée Storm of Strangers). Le jeune cinéaste se signale aussi par son engagement politique. Boxtar Bertha dénonce les méthodes des milices du capitalisme au moment de la grande dépression économique des années trente. Street scenes 1970 est un film militant réalisé au sein du "Collectif Cinetracts" au cours des manifestations contre l'intervention au Cambodge. La rencontre avec l'acteur Robert De Niro apporte une grande unité à une œuvre dominée par les thèmes de la violence, de la musique rock et de la souffrance christique. Robert De Niro est la vedette de cinq de ses films : Mean streets, Taxi driver , New York, New York, Raging Bull et La valse des pantins. En 1999, il retrouve une veine politique avec A tombeau ouvert, dont le protagoniste est un ambulancier interprété par Nicolas Cage.

En 1985, une "campagne anti-blasphème" venue des ultras du protestantisme américain rebondit en France à propos d'un projet d'adaptation de La dernière tentation du Christ, d'après Nikos Kazantzakis. Le ministre de la Culture Jack Lang et le procureur Humbert Balsan, favorables à la réalisation du projet en France, reçoivent plus d'un millier de lettres de protestations. C'est alors que le Cardinal Lustiger intervient directement auprès de l'Élysée pour faire obstacle au projet. L'obsession de Scorsese pour la religion était déjà nettement perceptible dans , l'épisode Mirror, Mirror ('anthologie de l'horreur produite par Steven Spielberg Histoires Extraordinaires), se retrouve dans les vidéo-clips Bad de Michael Jackson (1987) et Somewhere Down the Crazy River de Robbie Robertson (1988), les publicités pour Giorgio Armani ou Apprentissages, l'un des trois sketches de New York stories (les deux autres réalisés par Francis Coppola et Woddy Allen). Elle se poursuivra avec Kundun (1997), l'épopée du Dalai Lama depuis son enfance au Tibet jusqu'à sa fuite en exil.

La cinéphilie de Scorsese l'amène à renouveler le genre de la comédie musicale avec New York, New York. Avec La couleur de l'Argent, Martin Scorsese rend hommage à un classique du cinéma américain, L'arnaqueur de Robert Rossen. Paul Newman y reprend vingt-cinq ans après le rôle de l'ex-champion de billard, Fast Eddie Felson, face à un brillant et impétueux disciple (Tom Cruise). Cette veine, que l'on peut qualifier de " cinéphilique ", se poursuit avec Les nerfs à vif, remake du thriller tourné par J.Lee Thompson en 1962, produit par Steven Spielberg. Là encore, l'hommage est sincère et le respect évident. D'ailleurs, Scorsese réutilise la partition de Bernard Herrmann. Toujours dans la même optique, il crée en 1992 la société "Martin Scorsese Presents" chargée de la diffusion de grands classiques. En 1995, il est le maître d'œuvre d'une histoire très personnelle du cinéma américain : Voyage dans le cinéma américain, produit par Florence Dauman pour la BBC. En 1999, il sera également l'auteur de Mon voyage en Italie.

Il aborde pour la première fois le film d'époque avec Le temps de l'innocence, d'après le roman de Edith Wharton, déjà porté à l'écran en 1924 et 1934. Pour cette somptueuse reconstitution de la haute société de Manhattan en 1870, il fait appel à Michelle Pfeiffer, Daniel Day-Lewis et Winona Ryder, acteurs étrangers à son cercle habituel de comédiens.

Une autre source d'inspiration est la "saga mafieuse", commencée en 1973 avec Mean streets. Les affranchis (1990) a pour personnage principal le gangster repenti Henry Hill (Ray Liotta) que l'on suit depuis ses années de formation à Brooklyn jusqu'à sa prise en main par le F.B.I. On y retrouve bien entendu De Niro, mais aussi Joe Pesci, autre acteur fétiche. Tous deux seront présents - ainsi que Sharon stone- dans Casino (1995) , épisode de l'implantation de la pègre à Las Vegas dans les années 70. Les infiltrés (2006) oppose à Boston, dans une lutte sans merci, la police à la pègre irlandaise.

La musique prend une part de plus en plus importante dans sa filmographie. Apres New York, New York (1977) et The last waltz (1978) c'est Du Mali au Mississippi (2003), No direction home : Bob Dylan (2005) et Shine a light (2008).

Assumant volontiers la fonction de producteur exécutif auprès de cinéastes débutants ou indépendants, il lui arrive de passer devant la caméra pour des participations allant d'une fugace apparition extrêmement symbolique (le passager d'un taxi dans Taxi driver, un technicien lumière de boite de nuit dans After hours, un photographe dans Le temps de l'innocence) à des emplois plus importants : un cinéaste victime du maccarthysme dans La Liste noire ; un sponsor de jeu télévisé dans Quiz show, Van Gogh dans Rêves d'Akira Kurosawa, un comptable des impôts dans Search and Destroy.

Martin Scorsese a été marié à Isabella Rossellini, la fille d'Ingrid Bergman et de Roberto Rossellini.

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Bertrand Tavernier

Bertrand Tavernier, né le 25 avril 1941 à Lyon, est un réalisateur, scénariste, producteur et écrivain français, président de l'Institut Lumière. Il est le père du réalisateur et comédien Nils Tavernier et de la romancière Tiffany Tavernier.

Fils de l'écrivain et résistant lyonnais René Tavernier, il fut d'abord assistant-réalisateur, attaché de presse et critique avant de passer à la mise en scène avec L'Horloger de Saint-Paul, son premier succès critique, à la base d'une longue collaboration avec l'acteur Philippe Noiret (Que la fête commence, Le Juge et l'Assassin, Coup de torchon, La Vie et rien d'autre, La Fille de d'Artagnan).

Éclectique, il a abordé plusieurs genres cinématographiques, de la comédie dramatique (Un dimanche à la campagne, Daddy Nostalgie) au film de guerre (Capitaine Conan) en passant par le film historique (Laissez-passer, La Princesse de Montpensier) ou le polar (L.627, L'Appât). Plusieurs de ses films ont été récompensés, en France et à l'étranger (dont Autour de minuit qui remporta un Oscar et fut nommé aux Golden Globes).

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Enfance et débuts

Le père de Bertrand Tavernier, René Tavernier, écrivain et fondateur de la revue Confluences, publia sous l'Occupation de grandes plumes comme Paul Éluard et Louis Aragon ; ce dernier vécut pendant la Seconde Guerre mondiale avec son épouse Elsa Triolet au-dessus du domicile des Tavernier. Selon Bertrand Tavernier, c'est pour sa mère, Geneviève Dumond (1918-2002), que fut écrit l'un des plus beaux poèmes d'Aragon, Il n'y a pas d'amour heureux. Plus tard, en 1965, en tant qu'attaché de presse pour Jean-Luc Godard, il invita Aragon à voir Pierrot le fou dont le poète fit l'éloge à travers un article devenu fameux, « Qu'est ce que l'art, Jean-Luc Godard » dans les Lettres françaises.

Ses parents quittent Lyon pour Paris en 1950 car René Tavernier est un mauvais gestionnaire et sa revue Confluences ne marche plus. Ils envoient leur jeune fils trois ans en pension à l'école Saint-Martin-de-France dirigée par la congrégation des Oratoriens où il fait l'expérience du sadisme et de l'humiliation. Il découvrit le cinéma dans un séjour au sanatorium se soignant de la tuberculose, son premier film marquant est Dernier Atout. Après avoir réussi son baccalauréat à la seconde tentative, il entame des études de droit à la Sorbonne où il fonde avec des amis l'Étrave, revue d'étudiants sur le cinéma. Passionné de cinéma depuis l'âge de douze ans, il a notamment fréquenté la cinémathèque, fondé avec des amis en 1961 un ciné-club, le Nickel Odéon, pour promouvoir les genres dédaignés (westerns, films noirs, comédies musicales). Il commence à gagner sa vie en faisant des piges pour Télérama puis devient critique à Cinéma 59 ou 60.

Il fait ses débuts dans le cinéma comme assistant de Jean-Pierre Melville (Léon Morin, prêtre), expérience qu'il évoque dans le documentaire Sous le nom de Melville réalisé par Olivier Bohler.

Critique de cinéma

Cinéphile passionné, Bertrand Tavernier a écrit plusieurs ouvrages importants sur le cinéma américain notamment, donné de nombreuses conférences et participe régulièrement à des bonus DVD. Dans les années 1960, il fut l'un des premiers à aller interviewer des réalisateurs étrangers et à analyser thématiquement leurs filmographies. Outre les metteurs en scène connus, tels John Ford, Raoul Walsh ou John Huston, il contribua à faire connaître en France Delmer Daves, André De Toth ou Budd Boetticher (dont il programmait les films avec son ciné-club, le « Nickel Odéon ») et participa, entre autres avec Martin Scorsese, à la redécouverte de l’œuvre de Michael Powell. En outre, il engagea pour ses films des scénaristes français des années 1950 comme Jean Aurenche ou Pierre Bost.

Comme critique cinématographique, il collabore dans les années 1960 à plusieurs revues : Les Cahiers du cinéma, Cinéma, Positif, Présence du cinéma, etc.

Réalisateur et producteur

Il se démarque des réalisateurs de sa génération par la volonté de redonner une place primordiale à une narration passée à la trappe à la fin des années 1950. Il redonne ainsi leur chance à de grands scénaristes et dialoguistes restés sur le bord du chemin, principalement à Jean Aurenche et Pierre Bost (« bêtes noires », avec le réalisateur Claude Autant-Lara, de François Truffaut dans son article Une certaine tendance du cinéma français). Grand cinéphile, il fait redécouvrir des auteurs comme Jean-Devaivre dont il adaptera l'autobiographie dans son film Laissez-passer. Si son goût le porte parfois vers les « films à costumes », il ne s'éloigne jamais des préoccupations contemporaines et son art reste profondément enraciné dans notre époque.

Bertrand Tavernier exprime, au gré de ses films, son aversion contre les injustices, son engagement contre la guerre, le racisme, les côtés sombres du colonialisme, la peine de mort et son combat contre les travers de nos sociétés contemporaines : délinquance, violence, chômage, misères physique et affective, drogue, sida, etc.

Certains longs métrages plus apaisés ou nostalgiques sont, à plusieurs reprises, imprégnés de la figure du père ou du temps qui passe et que l'on ne peut retenir (Un dimanche à la campagne, Daddy nostalgie).

Pour le réalisateur, la musique n'est jamais comme plaquée et fait toujours corps avec l'image. Dans ses premiers films tout particulièrement, une importante scène musicale ponctue le film et annonce un drame imminent : un chanteur des rues (Le Juge et l'Assassin), la scène de la guinguette (Un dimanche à la campagne), etc.

Ses amitiés et fidélités professionnelles donnent aussi un ton à son cinéma : Aurenche et Bost mais aussi Alain et Philippe Sarde, Marc Perrone, Philippe Noiret, Philippe Torreton et, plus tard, Jacques Gamblin. De manière paradoxale, sa filmographie, aux sujets et aux traitements très divers, reste tiraillée entre sa défense pour un cinéma français fort et indépendant et sa fascination pour une certaine culture nord-américaine.

Producteur (sa société se nomme Little Bear production), il exerce aussi des activités associatives (président de l'Institut Lumière, à Lyon).

Vidéos

Bertrand Tavernier évoque le cinéma français

Macron c'est l'antithèse de Gabin dans "Le Président"

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