45 - 9 juillet 1929 - Monthureux sur Saône

 

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SOMMAIRE

Seconde visite au curé - Note de 1946 - Perte des travaux d'érudition de l'abbé Didier Laurent après sa mort - Visite à Mme Pernod, descendante des Finance de la Bataille - Ses souvenirs de la verrerie, plats gravés, chandeliers, coupe, verres aux noms de Frédéric de Finance et de Julie de Bonnet - Note de 1946, identification de ces personnages - Bourbonne les Bains - Promenade en ville - Trois générations de Massey du Morillon y finissent leurs jours.

Je rends visite à l'abbé Didier Laurent, curé de Monthureux sur Saône, qui me remet un cahier où il a noté beaucoup de renseignements sur les familles verrières. Il me donne également l'adresse de deux dames issues de la famille de Finance et susceptibles de me fournir des renseignements, Mme Pernod à Monthureux et Mme Messin à Darney.

Note de 1946 : l'abbé Didier Laurent mourut quelques années après ma visite, après sa mort ses héritiers ne se rendant pas compte de la valeur des documents recueillis par lui, anéantirent ou dispersèrent au hasard tous les papiers trouvés chez lui après sa mort.

Visite à Mme Pernod. Lorsque je lui apprends l'objet de ma visite, Mme Pernod ne fait aucune difficulté pour nous recevoir. Mme pernod est le type de la petite rentière de gros bourg campagnard, toute affairée de la tenue de son logis. Elle a une soixantaine d'années.

«  Nous sommes, me dit-elle, ma cousine Messin et moi, descendantes des nobles verriers de la Bataille. Notre grand-père paternel, le docteur Monsseaux, médecin à Darney, avait épousé la fille unique de M. Borromée de Finance et d'une demoiselle d'Hennezel de Bazailles. Cet arrière grand-père fut le dernier maître de la verrerie, en association avec son beau-frère de Massey. Il mourut à la Bataille il y a une centaine d'années (1824). Il habitait une belle maison qu'il avait fait construire au bord de la Saône. Malheureusement, cette maison a été incendiée. Il n'en reste que les gros murs ».

Je raconte alors notre visite à la Bataille.

- "C'est là que mourut aussi mon arrière grand-mère de Finance, née de Bazailles, six ou sept ans après son mari. Sa soeur, Mme de Massey, restée veuve et sans enfants, quitte alors la Bataille. Elle se retira alors à Darney, auprès de sa nièce, ma grand-mère Monsseaux".

- «  Et la verrerie, madame, que devint-elle... »

- « La verrerie... elle fonctionna encore, tant bien que mal, pendant quelques années, puis les fours furent éteints définitivement. Le domaine restait indivis entre un grand nombre de descendants des anciennes familles. Mais on ne s'entendait pas, il y avait des mineurs. La Bataille rut vendue par licitation peu avant la guerre de 1870. Mon grand-père racheta au nom de sa femme, une partie des bois. Nous en sommes encore propriétaires ma cousine et moi. C'est comme cela que nous possédons des souvenirs de nos ancêtres.

Mme Pernod se lève. Elle prend sur une commode, un grand plat creux rectangulaire à pans coupés et le pose sur la table. Il est en cristal épais, taillé et gravé à la main assez naïvement. Son ornementation est nettement du goût 1840, la bordure est guillochée, sur la partie plate, assez large, courent de petits brins de feuillage, réguliers et raides. Dans le creux du plat, les huit pans sont ornés, deux par deux, d'arabesques et d'entrelacs rappelant des dessins à la plume, art des maîtres d'école d' il y a un siècle. Sur les quatre cotés et au fond du plat, de larges soleils, aux rayons gravés profondément, donnent un relief assez fort à l'objet. La gaucherie de l'artiste, décorateur de ce plat lui a donné du charme.

Mme Pernod nous montre ensuite trois autres objets, un verre moulé et fin, datant certainement de la même époque, un robuste chandelier aux proportions excellentes, une coupe, assez haute sur pied, dont le plateau est bordé d'une tresse ajourée, on l'imagine garnie de fruits au milieu dune table. Enfin un cruchon rond dont l'anse et le goulot sont aussi décorés de tresses de verre et gravés d'entrelacs. La fille de Mme Pernod aligne encore sur la table quatre verres de grandeur différentes. Ils sont décorés dans le même goût que le plat. Le plus grand est à pied. Il est taillé de larges cotes rappelant le verre que nous a montré hier, Mme Schuster. Le bord est orné d'une guirlande de feuillage tout à fait Reine-Amélie.

Les trois autres verres sont plus intéressants. On peut évoquer leurs possesseurs. Des guirlandes et des branches de fleurs, finement ciselées, les décorent. Deux sont en forme de gobelet, droit et trapu, on les tient bien en main. Le plus grand verre porte en lettres capitales, le nom de :

FRÉDÉRIC

DE FINANCE

L'autre est plus petit - un verre de femme ou d'enfant - Il est gravé en lettres gothiques, au nom de :

Julie de Bonnet

Le troisième a une allure de timbale. Il ne porte qu'une initiale, L. Cette majuscule est encadrée de palmes. Sur la partie opposée, un oiseau de contes de fées, entouré de fleurs naïves.

- « On m'a toujours dit, raconte Mme Pernod, que ces objets venaient de la verrerie du Tolloy. Mais ils auraient été gravés à la taillerie de la Bataille. Je n'ai jamais su à quelle personne a appartenu le verre portant un L. Les deux autres viennent des parents d'une de mes tantes, femme d'un frère de mon père. Cette dame mourut toutte jeune et sans enfants. Elle demeurait au Tolloy, où son père, M. Frédéric de Finance, était venu finir ses jours, après avoir pris sa retraite de percepteur. Sa mère, Julie de Bonnay, était une cousine de ma grand-mère Monsseaux. elle mourut aussi au Tolloy, peu de temps après son mari (1877).

M. et Mme de Finance n'ayant pas laissé de descendants, les souvenirs de famille qu'ils possédaient échouèrent chez mon oncle Monsseaux. Voila monsieur, comment je me trouve en possession de ces verres ».

Note de 1946

Les notes de mes amis, les commandants de Massey et Henri Klipffel, si au fait de l'histoire de nos familles, m'ont permis d'identifier les possesseurs de ces verres. Il peut-être utile de les reproduire ici.

Nicolas, Séraphin Frédéric de Finance était l'un des trois enfants de Nicolas Marie Séraphin de Finance de la Neuve Verrerie et de Rosalie Catherine de Bonnay. Il naquit au Tolloy (30 janvier 1808) où son père était venu habiter après son mariage. Frédéric fut percepteur à Aydoilles puis à Lamarche. Il épousa au Tolloy (2 février 1840) sa cousine germaine Marie Julie de Bonnay, fille de Louis Alexandre et de Marie Claude de Finance. Ils n'eurent qu'une fille, marie Alexandrine mariée dans l'église de Vioménil, le 6 juillet 1810, à pierre Joseph Monsseaux, demeurant à Darney, oncle de Mme Pernod. Cette jeune femme mourut au Tolloy, cinq mois après son mariage (9 décembre 1810).

La multiplicité des alliances entre ces mêmes familles est extraordinaire. Elle s'explique par leur manque total de fortune et leur existence casanière. Fidèles au coin de terre ancestral, ces braves gens préféraient à tout autre bien la vie familiale, sous le toit qui les avait vus naître.

Et certains d'entre eux exercèrent une petite influence sur la population qui les entourait - le père de Frédéric fut maire de Vioménil sous la restauration - et savouraient aussi, comme César, la satisfaction d'être les premiers dans un coin du monde, les autres vécurent dans une médiocrité complète. Cela rend excessivement difficile l'étude de leur généalogie. Il est cependant utile de situer les personnages, même les plus obscurs parce qu'on peut retrouver, un beau jour, leur trace de façon intéressante.

C'est le cas pour les beaux verres de cristal gravés au nom du ménage Frédéric de Finance, sans doute à l'occasion de son mariage et que détient, aujourd'hui, à Monthureux, leur lointaine parenté.

Suite Monthureux  

Comme le temps est magnifique, nous décidons d'aller visiter différents localités ou des membres de nos familles ont vécu à certains époques, Villars St Marcellin, Châtillon sur Saône entre autres. Nous prenons la route de Bourdonne.

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